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PAR UN SOIR DE PRINTEMPS

grands arbres, la îune tout à coup s’était montrée. Elle avait peu à peu monté à travers les branches qui se dessinaient sur son orbe, et, gravissant le ciel, au milieu des étoiles qu’elle effaçait, elle s’était mise à verser sur le monde cette lueur mélancolique où flottent des blancheurs et des rêves, si chère aux attendris, aux poètes, aux amoureux.

Les jeunes gens l’avaient regardée d’abord, puis, tout imprégnés par la douceur tendre de la nuit, par cet éclairement vaporeux des gazons et des massifs, ils étaient sortis à pas lents et ils se promenaient sur la grande pelouse blanche jusqu’à la pièce d’eau qui brillait.

Lorsqu’elles eurent terminé les quatre parties de piquet de tous les soirs, les deux mères s’endormant peu à peu eurent envie de se coucher.

— Il faut appeler les enfants, dit l’une.

L’autre, d’un coup d’œil, parcourut l’horizon pâle où deux ombres erraient doucement :

— Laisse-les donc, reprit-elle, il fait si bon dehors ! Lison va les attendre ; n’est-ce pas, Lison ?