Page:Maurice Joly - Les Affames - E Dentu Editeur - 1876.djvu/121

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qu’un voyageur égaré la nuit dans le désert, qui se guide sur les feux follets pour trouver son chemin. Après retouches sur retouches, remaniements sur remaniements, paroles et musique du Siège de Corinthe avaient été repoussées avec perte à tous les théâtres de chant.

Au milieu de tout cela, il fallait vivre ; fils unique et ayant quelque fortune à attendre de son père, Léon Gaupin courait les usuriers du quartier Latin, prêt à signer toutes les lettres de change et à emprunter à tous les taux usuraires possibles.

Le hasard l’avait bien adressé en le faisant tomber dans la pension du père Lamoureux. Il y avait rencontré Lecardonnel et l’abbé Ecoiffier, qui joignaient le métier d’usurier à leurs autres industries plus ou moins occultes, et exploitaient le quartier Latin sous la direction d’un troisième personnage que nos lecteurs connaîtront bientôt.

Léon Gaupin avait emprunté de l’argent à Lecardonnel, il en avait emprunté à Ecoiffier, Dieu sait à quel taux ; mais actuellement le crédit était mort de tous côtés, et le malheureux jeune homme ne savait plus où donner de la tête.

Karl était occupé en ce moment à jouer aux échecs avec l’abbé Ecoiffier dans un coin du café, pendant qu’un brouhaha épouvantable se faisait entendre dans la première pièce, où des couples bachiques folâtraient au milieu d’un torrent de fumée.

Il y avait la, outre Marius Simon, Belgaric de l’Odéon avec Zoé Canada, Gédéon Mathieu, que nous avons vu au cercle de la rue Bergère, Berg-op-Zom que nous ne connaissons pas encore. Nous achèverons rapidement l’esquisse de quelques-uns de ces