Page:Maurice Joly - Recherches sur l'art de parvenir - Amyot éditeur - 1868.djvu/21

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tout rentre bientôt dans l’ordre quand il vient à être troublé.

Il y a là un secret de l’organisme social que l’on ne révèle pas d’ordinaire.

Ce qu’il faut constater d’abord c’est que l’égalité ne donne rien ou presque rien de ce qu’elle promet. Quand on a proclamé l’égalité de droits, on reste en présence de l’inégalité de forces. Les distinctions de la naissance sont supprimées, mais celles qui tiennent à la supériorité des facultés naturelles subsistent et elles suffisent pour reconstituer des privilèges, pour élever entre les hommes des barrières à peu près aussi insurmontables que celles qui séparaient autrefois les différentes classes de la société. Chacun ne prend que la place qu’il peut prendre. Les uns s’élèvent par leur énergie et par leurs talents jusque dans les régions supérieures, tandis que les autres ne peuvent conquérir que des positions intermédiaires ou sont reportés violemment jusqu’aux derniers rangs de la société où il faut, bon gré mal gré, qu’ils se tiennent.

Si cela est vrai, qu’en conclure ? c’est qu’il y a au fond de l’âme humaine des instincts impérieux, en vertu desquels les hommes se subissent et se subordonnent. Les individus, comme les divers groupes dont la société se compose, sont attirés ou retenus dans des sphères distinctes par des forces d’attraction et de gravitation dont le principe même est en eux et à l’empire duquel ils ne peuvent pas se