Page:Maurice Joly - Recherches sur l'art de parvenir - Amyot éditeur - 1868.djvu/68

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ratification de la France et dont les clauses se discutaient sur le tapis vert, le mot d’alliés était répété plusieurs fois et avait été mis là intentionnellement par les puissances belligérantes qui avaient conclu contre la France l’alliance de Chaumont. C’était une manière de constater que l’on traitait avec des vaincus, M. de Talleyrand écouta cette lecture avec le plus grand flegme jusqu’à ce qu’on fût arrivé au mot d’alliés. Là, il interrompit du geste, fit une pause et dit :

« Je ne connais pas d’alliés, car les alliés supposent la guerre, et la guerre a fini au 31 mai 1814. »

Puis il écouta le reste de la pièce avec l’attitude d’un homme qui ne comprenait pas et qui certainement ne pouvait pas être accusé de manquer d’intelligence. Il déconcerta les assistants par des airs de surprise, par des questions renouvelées coup sur coup, au point de jeter la réunion dans une confusion indicible.

C’était de la haute mise en scène.

DU LANGAGE, DE LA CONVERSATION ET DE L’ESPRIT

Toutes ces choses, de même que celles qui précèdent, rentrent par un certain côté dans le chapitre des manières. Avoir des manières et en même temps de l’esprit ou de la conversation, c’est avoir un es-