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Page:Maurice Joly - Recherches sur l'art de parvenir - Amyot éditeur - 1868.djvu/87

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On chercherait longtemps avant de trouver un conseil d'une aussi haute perfection.

La dissimulation est une des facultés que les hommes estiment le plus. Elle leur apparaît comme un signe de force, comme un caractère de supériorité morale évidente, et cette manière de voir n'est pas si mal fondée.

Ne pas dire sa façon de penser, n'est-ce pas donner un gage de sa prudence ? N'est-ce pas un signe probable de force de caractère et de concentration d'esprit ? Ce n'est pas tout. La dissimulation agit sur l'imagination des hommes par le prestige tout-puissant du secret et de l'inconnu. Un homme qui ne dit pas sa pensée est supposé tenir la vérité, on suppose de même la force d'action à celui qui ne confie pas ses projets.

Tout cela est fondé sur la niaiserie humaine, et l'on apprend à jouer à ce jeu-là comme l'on apprend à jouer au trictrac ou à l'écarté.

Il est vrai que la dissimulation suppose d'autres facultés, non moins appréciables, la ruse, l'astuce, la duplicité, ces grands instruments de la politique, Cromwell, qui se connaissait en cette matière, avait coutume de dire: « L'artifice et la tromperie donnent à vivre la moitié de l'année, l'artifice et la tromperie donnent à vivre l'autre moitié. » On peut en croire des hommes aussi pratiques et qui savent si bien l'humanité.

Un personnage historique qui, dans un rôle de