Page:Maurice Leblanc - La Barre-y-va.djvu/154

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Et il reprit, du ton stupéfait d’un homme qui ne comprend pas :

« Du premier jusqu’au dernier mot. On croirait que vous avez assisté à tous mes actes depuis deux mois et que vous avez lu toutes mes pensées.

— Tu as raison, Arnold. Ce que je ne vois pas, je le devine. Ta vie m’apparaît telle qu’elle a dû être. Ton présent explique ton passé. Tu as dû faire partie de quelque cirque où tu exerçais le métier d’acrobate, n’est-ce pas ?

— Oui, oui, répondit Arnold, dans une sorte de délire où il était comme fasciné par Raoul.

— N’est-ce pas ? tu savais étirer, allonger ton corps, de façon à te glisser dans un tonneau trop étroit ? Malgré ton âge, tu peux encore, au besoin, monter dans ta chambre par l’extérieur, en t’aidant des tuyaux et des gouttières ?

— Oui, oui.

— Alors, je ne me suis pas trompé ?

— Non.

— En rien ?

— En rien !

— Et tu es l’amant de Charlotte ? Et c’est sur ton conseil qu’elle a ensorcelé Béchoux, qu’elle l’a fait venir ici, pour te permettre de travailler à ton aise, sous la protection de la police qu’il représentait ?

— Oui… oui…

— Et Charlotte te renseignait sur ce que tes patronnes lui confiaient, c’est-à-dire sur mes projets ?

— Oui… oui… »

À mesure que le domestique confirmait les précisions données par Raoul, la colère de Béchoux devenait plus violente. Livide, chancelant, il empoigna le domestique par le collet et, le secouant, bredouilla :

« Je t’arrête… Je te livre au Parquet… tu répondras de tes crimes devant la justice. »