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Page:Maurice Leblanc - La Barre-y-va.djvu/75

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d’œil lui suffit pour constater que deux larges verrous avaient été posés, sans doute la nuit précédente, à l’extérieur des volets du billard, ce qui rendait tout effort inutile et facilitait la fuite de l’ennemi.

Raoul regagna donc le boudoir, où Catherine, Béchoux et les deux domestiques s’empressaient autour de Bertrande Guercin, qui, cette fois, avait été l’objet de l’attaque. Le projectile, brisant la vitre, avait sifflé à son oreille, sans l’atteindre heureusement, et s’était aplati contre le mur opposé.

Béchoux, qui le recueillit, affirma posément :

« C’est une balle de revolver. Dix centimètres de déviation à droite, et la tempe était trouée. »

Et il ajouta, d’une voix sévère :

« Qu’en dis-tu, Raoul d’Avenac ?

— Je pense, Théodore Béchoux, répondit Raoul nonchalamment, que Mlle Montessieux n’aura plus d’hésitation à partir.

— Aucune », déclara-t-elle.

Ce fut une nuit d’affolement et de panique. Sauf Raoul qui se coucha et dormit en paix, tout le monde veilla, l’oreille tendue, les nerfs surexcités. Le moindre craquement les faisait tous tressaillir.

Les domestiques firent les malles et s’en allèrent en carriole à Lillebonne, où ils prirent le train pour Le Havre.

Béchoux réintégra sa chaumière afin de surveiller aisément le domaine de la Barre-y-va.

À neuf heures, Raoul conduisit les deux sœurs au Havre et les installa dans une pension de famille dont il connaissait la directrice.

Au moment de le quitter, Catherine, tout à fait détendue, lui demanda pardon.

« Pardon de quoi ?

— D’avoir douté de vous.

— C’était naturel. En apparence, je n’ai obtenu aucun résultat dans la tâche entreprise.