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II

ESCALES

Djibouti, le 7 novembre 1928.

« Alamé ! Alamé ! » Ce sont les petits Somalis de la côte, nus comme des vers et noirs comme de l’encre qui, sans crainte des requins, nagent autour du bateau et guettent les sous que les passagers leur jettent. Jamais ils ne les ratent ! En un bref éclair cuivré, la pièce disparaît dans l’eau, le négrillon plonge et reparaît la joue gonflée : le sou a rejoint les sous précédents dans cette tirelire improvisée. Chose curieuse, loin à l’intérieur, à des centaines de kilomètres le long de la voie du chemin de fer, d’autres petits Somalis, misérables et mal venus ceux-là, victimes de la tuberculose, de la syphilis et de la civilisation des blancs, mendient et quêtent la menue monnaie et les débris des festins des voyageurs en clamant à tue-tête ce même « alamé ! alamé » quoiqu’ils n’aient jamais vu la mer, les pauvres, ni beaucoup d’eau non plus, dans ce désert de damnés. Sans doute cela veut dire pour eux un sou, en français.

Djibouti, chef-lieu de la côte française des Somalis, qui a remplacé Obock, comme siège du Gouvernement a la réputation d’être le port le plus chaud d’Afrique et d’offrir comme seule verdure deux palmiers en fer blanc devant le palais du Gouverneur. Réputation surfaite ! Il fuit aussi chaud ailleurs, sur l’île de Périm par exemple, l’enfer des officiers anglais, que nous venons de côtoyer, et… une allée de vrais palmiers mène aux beaux bâtiments du Gouvernement. Djibouti, — réhabilité — possède un Jardin des