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chasses et voyages au congo

Bruxelles, est à la recherche du filon qui va donner à sa Société et à lui-même la fortune qu’il est venu quérir dans ces parages. Mais si l’on veut un jour exploiter les richesses du Manyéma, et il est bien possible que celui-ci devienne plus tard un second Katanga, il faudrait, me semble-t-il, commencer par y créer les moyens d’y attirer et d’y faire vivre la population ouvrière qu’exige toute grande entreprise. Les travailleurs ne peuvent être constamment nourris de viande de buffle ou d’éléphant et à la longue ; la ressource fournie par le gibier viendra elle-même à disparaître ; alors ne serait-il pas sage de pourvoir dès maintenant à une lacune qui m’a d’ailleurs paru être générale dans toute la partie du Congo que j’ai visitée. Amener du bétail du Ruanda, où il pullule paraît-il, ou encore des colonies anglaises du Sud où il est bien acclimaté, me paraîtrait être pour un colon bien avisé une source presque certaine de profits, et si j’avais vingt ans de moins, peut-être même que je tenterais l’aventure.

Une chose me frappe, c’est que les régions que nous parcourons, qui du temps de Stanley étaient si peuplées, paraissent aujourd’hui presque vides d’habitants, et s’il est vrai que la maladie du sommeil a causé par ici des ravages terribles, il est non moins exact que la population indigène au lieu d’augmenter va en diminuant d’année en année : on voit peu ou pas d’enfants dans les localités qu’on traverse et si la mortalité infantile n’en est pas la seule cause, il est certain que si en même temps que de la viande pour les adultes on arrivait à procurer du lait aux nourrissons, on aurait résolu une partie du problème de la dépopulation qui est à mon avis l’un des grands dangers pour l’avenir du Congo belge.

Tandis que je me livre à ces réflexions nous avons peu à peu gravi l’une après l’autre les collines qui nous séparent du sommet ; toujours des prés à perte de vue, et le soleil qui a réapparu entre temps met une note de gaîté dans ce paysage alpestre : de temps en temps sans qu’on sache pour