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ANTHINEA

naïve et forte, qui, sur la terre et sous la terre, pour sa tombe et pour sa maison, employa l’appareil et le style des mycéniens. Mon sentiment, s’il faut le dire, fut d’abord que j’entrais dans une annexe du musée du Trocadéro. À chaque page de mes notes, je trouve dénoncé et presque ilétri avec une extrême abondance ce que je nommai doucement les sauvageries de Mycènes. Cette fureur avait pour cause le contraste qui éclatait entre des curiosités pures et les beautés de premier ordre au milieu desquelles je ne cessais d’errer.

C’était oublier l’émotion presque religieuse qu’inspire un passé très lointain. Plusieurs de ces ouvrages dont la grossièreté ne me donnait que du dégoût nous sont prouvés antérieurs aux convulsions d’un îlot volcanique dont la date est connue ; ils remontent ainsi authentiquement à deux mille ans avant notre ère… De plus ces découvertes sont très nouvelles. La science est ancienne. Elle est un peu blasée sur ses triomphes d’autrefois. Pour moi, qui ne l’étais sur rien, ma curiosité toute fraîche bondissait à tous les objets. Aucun moulage, aucune gravure ne m’avaient permis de prévoir la subite impression que me communiquaient, vivant devant moi dans leur marbre, une Victoire renouant sa sandale, les Taureaux de la frise, ou la tribune d’Erechtée. L’inépuisable trésor de mon ignorance me procu-