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préface de la deuxième édition

n’être pas « manœuvré » par lui… Que blâmait-on dans notre politique extérieure ? Comme nous, la discontinuité, l’ataxie et, dès lors, le défaut d’activité spontanée. On allait jusqu’à dénoncer le défaut central à sa place, dans ces vides supérieurs de l’État que le député socialiste Marcel Sembat m’avait très bien définies, dans une lettre antérieure[1], « un trou par en haut » : quand, au cours des débats sur l’accord congolais, le cinquième ou sixième successeur de M. Delcassé, M. de Selves, se vit réduit à quitter la place, sa lettre publique au Chef de l’État déplora que « à notre politique extérieure » fissent défaut « l’unité de vues et l’unité d’action solidaire »[2], La solidarité nationale en un régime de parti ! On souhaitait cette chimère, on proposait d’autres remèdes ridicules et palliatifs dérisoires ; mais c’était toujours du même côté que se tendaient les regards et les intelligences. On sentait distinctement ce qui nous manquait.

« Nous n’avons pas, nous ne pouvons pas avoir… ! » L’épigraphe de M. Anatole France obsédait les esprits comme l’ombre portée par l’illusion républicaine à son couchant. La presse officielle ne pouvait pas nommer l’immense lacune, mais elle en trahissait la haute anxiété. Anxiété, non pas doute. Sentiments avivés et empoisonnés, par une terreur manifeste que la France tout

  1. Voyez l’appendice XV.
  2. Lettre du 9 janvier 1912.