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Page:Maurras - Kiel et Tanger - 1914.djvu/89

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lxxxv
l’esprit du mal

mellement par le droit constitutionnel du régime.

Aussi, quand y naît par hasard un accord spontané des bons citoyens, c’est un bienfait que rien ne prolonge et que personne ne maintient. Entre ce bien présent et les maux ultérieurs possibles l’État est neutre. L’État semble se désintéresser de conduire sa bonne et heureuse fortune jusqu’à l’aurore d’un lendemain qu’il ne peut avoir souci de garantir. La garantie n’existerait que par l’institution d’un magistrat préposé et intéressé uniquement à l’accord, au bien. Mais ce magistrat est exclu par le seul nom de République. La République confie le soin de maintenir l’accord à cet accord lui-même, c’est-à-dire à rien du tout. Elle fait confiance à la fermeté de l’opinion, à la raison du jeu des partis. Autant dire qu’elle se confie à la vague. Patriotes, conservateurs, assurez-vous sur cet élément…

De plus, nos idées, nos formules, qui mettent si haut l’idée de l’État, ont la vertu d’irriter tel républicain et d’attirer tel autre : contribuant ainsi à les diviser furieusement, elles les poussent à s’entre-détruire avec plus d’entrain. Discuter et se prendre aux cheveux sur tout, aboutir le plus tard possible à l’action, qui impose l’union, c’est chez eux, à la fois, habitude, système et fatalité. Ils n’en sortent que s’il s’agit de préserver cette façon de perdre la vie et le temps : en ce cas de défense républicaine, ils agissent d’autant plus vite qu’ils sont plus pressés de revenir à leur cher entr’égorgement.