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le romantisme féminin

pas besoin d’être beaux pour qu’on les aime. Et quel regard lisse de fille de seize ans vaudra mon cœur démonté, mes yeux de douleur et de rage ! » La petite fille, qui devient jeune fille, passe pour un animal dangereux. On nous confie pourquoi : « Elle se plaisait à émouvoir les jeunes gens qui l’entouraient, à leur faire désirer la fleur qu’elle avait cueillie et tenue entre ses mains, les fruits qu’elle avait touchés. Elle se sentait près d’eux forte de sa grâce, de la science naturelle et croissante qu’elle avait des détours du regard et du geste… » Où tant de femmes hypocrites eussent écrit « instinct », celle-là, vraie, écrit « science ». C’est autant d’appris. Mme de Noailles continue son métier de traître ; elle avoue les calculs que notre lourde honnêteté de petits garçons avait peine à admettre quand nous étions assez hardis pour les concevoir. Et voulez-vous scruter son héroïne auprès de l’homme que Sabine aime ou veut aimer ? « Elle le sentait sans le voir, par tout son être, par le cœur et par l’épaule. » Un regard de convoitise forte, Sabine le reçoit « avec un pliement délicieux et un merveilleux craquement de l’orgueil ». Et voici, profanée, la pointe du désir divin : « Ce visage où tout la tentait ! » Enfin, la vaincue éternelle se déclare une révoltée ; le plus doux de ses rêves est de domination violente, de victoire perfide : « … Le tenir un jour endormi contre elle… Goûter ainsi à la faveur du repos de cette âme la plénitude possible de la sécurité et du pouvoir… » Nous obtenons jusqu’au secret de la tragi-comédie mensongère et sin-