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LA CACHE AUX CANOTS

regardant de tous côtés, il haussa les épaules et branla la tête comme chassant une pensée importune, puis, fixant son regard tout droit devant lui, il continua son chemin. Un peu plus loin, il quitta la route et, prenant la direction de la forêt, il disparut bientôt aux yeux des villageois…

— C’est le grand manchot de Cerf-Agile, dirent ceux-ci ; il semble être devenu fou ! Il a dû se passer quelque chose ; il faut aller voir ses parents…

Amiscou marcha sans arrêt toute la journée. Vers le soir, il s’étendit sur le sol du grand bois et s’endormit d’un sommeil de plomb. À son réveil, le lendemain, il se trouvait dans un état cérébral plus calme ; il se rendait compte de l’endroit où il était, mais du passé, nulle souvenance ; il sentait du mal à la tête, mais ne savait plus que c’était à la suite d’un coup de bâton ; il se rappelait être passé la veille dans un village où on l’avait nourri, mais, sauf son nom, Amiscou, sa mémoire ne lui apprenait rien !

À partir de ce temps, le manchot commença une existence nomade et étrange, sans gîte si ce n’est les abris qu’il s’aménageait dans la forêt ; il s’éloigna de plus en plus de la bourgade de son père adoptif, errant à l’aventure, ne se fixant nulle part. Il cheminait de hameau en hameau, ne se liant avec aucun compagnon, ne logeant dans aucun wigwam. Sa haute taille, la force inouïe de son unique bras, son