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LA CIVILISATION ET LE GRANDS FLEUVES

Nous avons vu, par suite de l’évolution du temps, l’absolu pharaonique de l’Égypte se diviser en deux parties distinctes, le temporel et le spirituel, qui ne tardèrent pas à lutter avec acharnement ; mais, sur les bords du Nil, la caste des prêtres ne réussit pas à s’assurer un triomphe durable. Tout autrement dans l’Inde : bien avant la fin de la période védique, l’usage s’était établi, pour les rois comme pour les simples particuliers, de remettre les fonctions sacerdotales du père de famille à des pourohita, descendants de quelque illustre poète de l’antiquité, ou à un chantre dont l’hymne[1] avait attiré la protection des dieux dans quelque grave circonstance publique ou privée. La classe des hiérophantes gagnait en influence à mesure que le rituel prenait une forme plus arrêtée et que des cérémonies particulières et complexes, comme l’Açvameda ou sacrifice du cheval[2] s’ajoutèrent aux libations de soma qui résumaient l’ancien culte des Aryas. Les souverains n’avaient pas encore abdiqué leurs fonctions sacerdotales, que nous les voyons déjà entourés de pourohita nombreux ; mais le zèle des prêtres pour la faveur royale témoigne suffisamment de leur rôle subordonné. « Le roi devant lequel marche le prêtre,

  1. « Un hymne par lequel on avait invoqué les dieux au commencement d’une bataille et qui avait assuré au roi la victoire sur ses ennemis, était considéré comme un talisman infaillible et devenait le chant de guerre de la tribu tout entière. » (Max Müller, Essais.)
  2. Il se peut que ce sacrifice, symbolique des holocaustes humains, fût pratiqué dès la plus haute antiquité par quelques tribus aryennes ; les autres ne la connurent que plus tard.