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LE HOANG-HO ET LE YANGTSE-KIANG.

de pays au monde qui puisse se vanter d’en posséder d’aussi volumineuse. L’art de l’écriture populaire semble, nous l’avons vu, avoir débuté au Céleste Empire par deux ouvrages, le Tchouñ-tsiñ et le Chou-king, ayant le caractère d’annales ; depuis vingt siècles, l’historiographie chinoise n’est pas seulement un des engins politiques les plus puissants, elle touche aussi de fort près à la religion. Pourtant, existe-t-il dans l’univers une nation dont les origines et le passé lointain soient cachés sous un plus impénétrable mystère ? Nombre de peuples qui se sont moins préoccupés de leur histoire que les Chinois ont conservé de leurs débuts des traditions vagues, mais authentiques, des réminiscences fragmentaires, mais non travesties avec préméditation, tandis qu’en Chine une réglementation prématurée, un précoce épanouissement philosophique et politique, remontant à la fin du vie siècle ou au commencement du ve avant Jésus-Christ, se dresse comme un mur au delà duquel nulle investigation scientifique ne saurait pénétrer. « Le passé de la Chine, dit un homme qui la connaît bien et que je ne me lasse pas de citer[1], n’est pas éclairé pour nous par les événements, mais bien par les idées des Confuciens qui altéraient les faits sans scrupule, car la reconstitution véridique des temps passés était leur moindre souci : ils avaient en vue la création d’une morale pratique et d’un système

  1. Vassilieff, ouv. cité.