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LE HOANG-HO ET LE YANGTSE-KIANG.

Mencius accuse-t-il Yang-tchou d’égoïsme, ou plutôt réprouve-t-il en lui les idées républicaines ? Il est malaisé de le dire. Quant à celui qu’il appelle Mo-ti, que ce soit le Mo-tse de Vassilieff ou tout autre philosophe dont les écrits ont disparu, le doute n’est pas possible. Le passage ci-dessus suffirait à prouver, si le fait n’était pas constaté par plusieurs documents, que l’esprit de révolte avait alors en Chine des champions bien plus hardis que Confucius et Mencius. Ne se contentant plus de blâmer les abus du pouvoir souverain, de maudire les exactions des riches et des puissants, ils demandaient la dissolution de l’État et l’abolition de la propriété et de la famille[1]. Or, à chaque page de ses écrits, Mencius proclame que le seul remède aux maux de la patrie est l’organisation de l’État sur le modèle de la famille, organisation dont le plan avait été tracé par Confucius avec une minutie vraiment chinoise : Meng-tse, du reste, ne se lasse pas de redire que l’honneur d’avoir indiqué cette voie de salut, véritable et unique, appartient entièrement au Maître.

Le qualificatif de « Père du Peuple », appliqué au souverain, se retrouve sous la plume de tout écrivain défendant une despotie qui s’écroule ; mais, pendant la période dont nous parlons ici, la Chine traverse l’heure, unique peut-être dans l’histoire, où cette conception apparaît avec l’attrait de la nou-

  1. Le Mo-tse de Vassilieff semble avoir été un représentant de ces doctrines, mais considérablement mitigées dans le sens du confucianisme.