Page:Mechnikoff - La civilisation et les grands fleuves historiques.djvu/93

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

sagée comme le produit direct de sa situation insulaire ; les Alpes ont servi de berceau et de rempart à la liberté des communes suisses ; plus sûrement que les chartes, les Pyrénées ont sauvegardé les fueros y libertades des montagnards basques.

Les jalons de l’étude analytique des influences géographiques sur l’homme sont à peine posés par les maîtres de la science moderne, mais l’application de ce procédé à l’examen des phénomènes sociaux et historiques assure déjà de précieuses découvertes. D’autre part, une analyse superficielle, non guidée par une méthode rigoureuse, conduirait bien vite au lieu commun, aux fantaisies téléologiques, aux déductions erronées. Les accidents naturels du milieu, plus ou moins analogues au point de vue de la topographie ou de la géographie physique, peuvent, devant la géographie comparée, représenter des valeurs essentiellement différentes. Dans les travaux de ce genre, méfions-nous, surtout, de ces conceptions a priori auxquelles l’érudition facile arrive à prêter parfois un faux-semblant de vérité scientifique. Quelques exemples expliqueront mieux ma pensée : en sociologie et en politique, nous avons l’habitude de considérer les hautes chaînes de montagnes comme des frontières naturelles entre les États, comme des barrières entre les civilisations et les races. C’est pourtant dans les Alpes que les trois grands éléments ethniques — Latins, Gaulois, Germains — qui se partagent l’Europe occidentale et centrale, nous apparais-