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LE ROI VIERGE

donc garde, bête ! tu m’écorches le dos avec ta bague.

« Trésor », c’était Gloriane Gloriani qui débutait ce soir-là au Théâtre-Italien. Comme elle arrivait de Vienne précédée d’une grande renommée, on lui avait donné la loge-boudoir, très-enviée des prime donne, qui a vu l'énorme Alboni s’habiller en Arsace et la fine Patti se vêtir en Rosine. Devant la haute psyché, entre les deux becs de gaz flamboyants, hors d’un désordre de peignoirs et de jupes repoussées du pied, très jeune, grande, blanche, grasse, et comme triomphante, elle s’épanouissait à moitié nue sous d’énormes touffes de cheveux roux.

Quant à Brascassou, c’était le coiffeur de Gloriane, son habilleur en même temps ; vieux et laid, chafouin, de petits yeux striés de sang bilieux, qui pleurent une ambre sale, l’os du nez cassé dans quelque ancienne aventure, et la narine qui se retroussait de travers, toute barbouillée de tabac dans les poils. Il était aussi l’amant de Gloriane, quelquefois.

— La robe maintenant ! dit-elle tant en aplatissant des deux mains les plis du jupon sur ses hanches. Eh bien, où est-elle ? Tu l’auras laissée