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Page:Mendès - Méphistophéla, 1890.djvu/476

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MÉPHISTOPHÉLA

car Gemmilly n’a que quatre ou cinq cents habitants, — on savait, c’était probable, tout ce qu’elle souhaitait d’apprendre ; Emmeline et son mari, plus d’une fois, avaient dû visiter M. d’Hermelinge. Puis, en somme, dût-elle, rôdant autour de l’habitation du baron, se trouver en présence de son mari, en être reconnue, où serait le péril ? Peut-être même n’aurait-elle pas été fâchée de revoir face à face l’homme qui l’avait torturée et battue, et, forte maintenant, délivrée de l’hymen, ne pouvant plus en être reprise, de jeter à la face de l’époux son mépris toujours vivace et sa furieuse rancune. Enfin, il s’agissait bien de cela ! Sans même avoir prévenu Céphise d’une absence qui se prolongerait peut-être plusieurs jours, — parler à Céphise, en un moment où elle se redonnait à Emmeline, lui aurait été insupportable, — elle partit de grand matin ; de son coin de wagon, elle voyait à travers la vitre la fraîcheur verte des plaines, des bois, la gaieté du soleil dans l’air traversé d’oiseaux. Voici que le printemps était aussi en elle. Elle se sentait pleine de choses vives et fraîches ; elle renaissait, comme ce paysage ; de même que, en ces aubespins tout le long de la voie, fleurissait l’oubli des noirs squelettes épineux qu’ils furent si long-