Page:Mercœur - Œuvres complètes, I, 1843.djvu/169

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durer ; car la pauvre enfant ne pouvait s’habituer à entendre celui qui, toute sa vie, l’avait bercée de contes et de principes de grammaire française et latine, lui parler d’amour, et malheureusement cette passion, en entrant dans le cœur de ce brave homme, en avait banni la raison ; il aimait Élisa d’amour, et prétendait qu’elle devait l’aimer de même ; que c’était le moindre prix dont elle devait payer les soins qu’il avait donnés à son éducation ; qu’elle lui devait sa célébrité, puisque, sans instruction, elle n’aurait pu être poète ; qu’il était juste qu’il lui dût son bonheur… Et mille autres extravagances de ce genre… Son amour lui rendait tout possible ; aucune considération, comme on va le voir, n’en devait empêcher l’accomplissement. Un jour que, fatiguée des efforts qu’il faisait depuis deux heures pour la faire consentir à devenir sa femme, elle lui dit qu’elle ne se déciderait jamais à épouser un homme qui avait quarante-huit ans de plus qu’elle. Il lui répondit que de même que l’amour égalisait tous les rangs, il égalisait tous les âges ; que l’on n’était jamais vieux quand on aimait [1], etc. Et, voyant que son argument était sans effet sur

  1. C’est cette réponse que M. Danguy fit à Élisa qui lui a servi