Page:Mercœur - Œuvres complètes, III, 1843.djvu/181

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

conscience ou prudence, selon le cas dont il s’agit, et qui, dans le fond de sa pensée, lui disait à peu près ce que nous venons de dire. Il hésitait, combattu entre la crainte et le désir de parler. Mais réfléchissant que s’il avait été jaloux, il ne l’était plus de qui que ce fût au monde ; qu’il pouvait raconter ses soupçons, sans nommer, sans indiquer en rien celui que son ombrageuse imagination lui avait un instant représenté comme un rival aimé, et d’ailleurs, entraîné à l’indiscrétion par un invincible besoin d’ôter son secret de son cœur… il parla.

Roger l’écoutait avec une admirable attention, sans changer d’attitude, sans laisser échapper d’autres mots que ces espèces d’aparté qui signifient, parlez toujours, je vous entends. Dérigny, encouragé par la contenance de son auditeur, se laissait aller à peindre jusqu’à la moindre de ses émotions. Plus il parlait, plus sa poitrine se dégonflait de soupirs. À chaque image passant de son esprit à sa voix, sa tête s’allégissait,