Page:Mercœur - Œuvres complètes, III, 1843.djvu/347

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sage qui passait près de lui. Mais rencontrait-il une expression de tristesse, des yeux languissans, des lèvres pâles, un front aux rides anticipées… alors il se disait : Dans le partage que le sort fait aux hommes, combien de lots d’infortune et combien peu de portions de bonheur ! Et sa pitié généreuse donnait un soupir aux misères d’autrui.

Mais bientôt ses regards ne se dirigèrent plus que vers un seul objet, non qu’il n’y eût plus à se promener qu’une seule personne et lui, mais il avait à lire, à présumer tant de secrets de malheur en examinant une douce et pâle figure de femme qu’avaient rencontrée ses yeux, que tout disparut pour lui hors celle qui était alors l’unique but de toutes ses pensées. Et pourtant il ne la connaissait pas, il ne l’avait jamais vue, elle ne ressemblait à aucune personne qu’il connût, et cependant elle ne lui était pas tout-à-fait étrangère ; c’était une de ses intimes fictions réalisées, c’était le type extérieur d’une femme aimante et malheureuse.