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Page:Mercier - L’An deux mille quatre cent quarante.djvu/329

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soumises aux devoirs que leur sexe leur impose, leur honneur est de suivre ses loix austères, mais qui seules assurent leur bonheur.

Tout citoyen qui n’est pas diffamé, fût-il dans le dernier emploi, peut prétendre à la fille du plus haut rang, pourvu que le consentement de celle qu’il recherche y réponde, & qu’il n’y ait point séduction ou disproportion d’âge. Tous les citoyens, sans marcher sur la même ligne, reprennent l’égalité primitive de la nature, lorsqu’il s’agit de signer un contrat aussi pur, aussi libre, aussi nécessaire au bonheur que celui de l’hymen. Là finit la borne du pouvoir paternel[1] & celle de l’autorité civile. Nos mariages sont fortunés, parce que l’intérêt qui corrompt tout ne souille point leurs nœuds aimables. Vous ne sauriez croire

  1. Quelle indécence, quelle monstruosité que de voir un père fatiguer vingt tribunaux, animé par l’orgueil barbare de ne point céder sa fille à un homme, parce qu’il la destinoit secrettement à un autre ; oser alors citer des ordonnances civiles, tandis qu’il oublie les loix les plus sacrées de la nature qui lui défendent d’accabler une fille infortunée sur laquelle il n’a d’autre autorité légitime que celle de l’accabler de bienfaits. Une chose tristement remarquable dans ce malheureux siécle, c’est que les mauvais pères ont surpassé le nombre des enfans dénaturés. Où est la source du mal ? Hélas, dans nos loix !