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Page:Mercier - L’An deux mille quatre cent quarante.djvu/97

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tomboit sous le glaive d’un bourreau ; ou sous le fer d’un assassin ! Nous n’avons point de ces tourmens qui font frémir la nature : nous respectons l’humanité dans ceux-mêmes qui l’ont outragée. Il sembloit dans votre siecle qu’on ne vouloit tuer qu’un homme, tant vos scenes tragiques, multipliées de sang froid, avoient perdu de leur force énergique, toutes horribles qu’elles étoient.

Le coupable, loin d’être traîné d’une maniere qui donne à la Justice un air bas & ignoble, ne sera pas même enchaîné. Eh ! pourquoi ses mains seroient-elles chargées de fers, lorsqu’il se livre volontairement à la mort ! La justice a bien le droit de le condamner à perdre la vie, mais elle n’a pas le droit de lui imprimer la marque de l’esclavage. Vous le verrez marcher librement au milieu de quelques soldats, posés seulement pour contenir la multitude. On ne craint point qu’il se flétrisse une seconde fois, en voulant échapper à la voix terrible qui l’appelle. Et où fuiroit-il ? Quel pays, quel peuple recevroit dans son sein un homicide[1] ? Et lui, comment pourroit-il effacer

  1. On dit que l’Europe est policée, & un homme qui a commis un assassinat à Paris, ou qui a fait une banqueroute frauduleuse, se retire à Londres, à Madrid, à Lisbonne, à Vienne, où il jouit paisiblement du fruit de son forfait. Au milieu de tant de trai-