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Page:Mercier - L’Habitation Saint-Ybars.djvu/107

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douta plus du salut de Saint-Ybars. Sémiramis regardait son fils avec fierté. On ne voyait plus que les mains de Saint-Ybars ; à leur tour, elles disparurent : Salvador plongea.

Sémiramis donna l’ordre à deux rameurs de rentrer leurs avirons, et de la tenir debout sur leur banc ; elle dit aux autres de dériver doucement. Elle avait confiance en son fils ; elle connaissait sa vigueur et son sang-froid. Mais les forces de l’homme le plus robuste s’épuisent ; la puissance de l’eau reste la même, infatigable, inexorable. Il y eut un moment de cruelle attente, et qui parut bien long à la vieille mère. Elle n’en laissa rien paraître ; si elle savait commander à elle-même.

Une échappée de soleil éclairait l’eau entre la chaloupe et la rive gauche. Sémiramis vit le buste de son fils surgir dans la zone de lumière ; à côté de la figure bronzée de Salvador, apparut la figure pâle de Saint-Ybars.

Sémiramis descendit, en disant :

« Alà yé ! »

Et s’adressant à Pélasge :

« Monsieur Pélasge, ajouta-t-elle, vous voyez où c’est éclairé là-bas ?

« Oui, man Miramis.

« Ils son là, dépêchons-nous. »

Tous les rameurs comprirent la nécessité de ne pas perdre une seconde ; la chaloupe avança comme une mouette qui vole en rasant les flots. Elle entra en étincelant dans la zone lumineuse. Il en était temps, les forces de Salvador l’abandonnaient. Au commandement de Sémiramis, un nègre le saisit, un autre prit Saint-Ybars. Salvador fit une petite pause pour respirer ; puis, il entra dans la chaloupe. Saint-Ybars, privé de connaissance, fut couché sur le dos. Démon, le croyant mort, se pencha sur lui en sanglotant et couvrit son visage de baisers. Pélasge donna la barre à Salvador, pour s’occuper de Saint-Ybars. Il posa sa main sur la poitrine du noyé :

« Son cœur bat encore, dit-il ; courage, Démon ! nous