Mme Saint-Ybars comprit immédiatement qu’il se passait quelque chose d’extraordinaire : elle courut sur la galerie. Deux de ses filles la suivirent. Elles arrivèrent juste à temps pour entendre Démon criant à l’économe :
« Arrêtez, misérable ! sinon, je vous tue, comme j’aurais tué Jim. »
Mme Saint-Ybars et ses filles se précipitèrent sur Démon, pour lui arracher son arme. Il se défendit avec acharnement. Les gâchettes se prirent dans la robe de Mme Saint-Ybars, les deux coups partirent ; heureusement les balles passèrent entre les deux sœurs de Démon, et s’enfoncèrent dans le mur. Les trois femmes s’emparèrent alors de lui, et l’emmenèrent malgré ses cris.
Au bruit de la détonation, Pélasge était accouru sur la galerie ; il y rencontra Nogolka.
L’économe avait rattrapé Jim, et l’avait ramené. Maintenant, libre de toute inquiétude, l’exécuteur préparait tranquillement sa corde pour attacher Mamrie.
Pélasge s’approcha de Nogolka, et dit en montrant Saint-Ybars :
« Et vous, Mademoiselle, ne ferez-vous pas un dernier effort pour épargner à Mamrie la douleur et la honte de ce supplice, et à cet homme fou d’entêtement des remords qui empoisonneraient son avenir ? Tout le monde ici vous bénira, moi plus que les autres. Sauvez Mamrie, vous qui pouvez tout sur ce forcené.
« Moi, qui puis tout ? demanda Nogolka surprise et inquiète.
« Vous qui pouvez tout ! » répéta Pélasge.
Et baissant la voix :
« J’étais sous le sachem, continua-t-il ; j’allais à votre secours, la chouette me devança. »
Nogolka rougit, puis pâlit ; elle vacilla ; Pélasge lui prit le bras et la main pour la soutenir.
« Allons, du courage ! dit-il ! allez vous jeter aux pieds de cet homme en démence ; sauvez Mamrie ; faites-le pour la famille, faites-le pour moi. »
Ce pour moi fit tressaillir l’institutrice ; son cœur battit