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Page:Mercier - L’Habitation Saint-Ybars.djvu/201

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comme un Italien, etc. Ces locutions ont leur danger ; à coup sûr, vous finirez par rencontrer quelqu’un qu’elles blesseront, et vous serez provoqué en duel. »

M. Héhé eut un frisson, et se tut.

On se disposa à partir. Démon et M. Héhé entrèrent dans le cab de Pélasge ; quant à lui, il prit place à côté du cocher ; il portait le fusil.

Lorsqu’ils furent dans l’avenue, Pélasge distingua au loin trois voitures à quatre roues et un cabriolet.

Ce n’était pas sans intention que M. des Assins était arrivé le premier. Dès qu’il vit Démon descendre du cab, il se campa théâtralement sur son passage. Démon s’avança de son pas ordinaire, les mains dans les poches de son paletot. Il comprit immédiatement que son adversaire voulait l’intimider ; il lui jeta, en passant, un regard dans lequel il y avait autant de mépris que de courage. Un des amis de M. des Assins en fut singulièrement frappé ; il dit à son voisin :

« Hum ! voilà un coup d’œil qui en dit beaucoup ; ce jeune homme va se battre avec un sang-froid admirable. »

À l’endroit choisi pour le combat, presque tous les chênes étaient morts ; des touffes de barbe espagnole pendaient ça et là de leurs rameaux desséchés, donnant largement passage à la lumière. La distance entre les combattants fut mesurée par Pélasge. Les adversaires furent invités à occuper leurs places ; elles avaient été tirées au sort, car l’une était moins bonne que l’autre. La chance favorisa Démon ; il tournait le dos au soleil.

M. des Assins ôta son manteau, sa redingote et même son gilet ; il les jeta négligemment à son domestique. Il garda son chapeau. M. de Lauzun n’avait pas les yeux assez grands pour l’admirer.

Démon ôta son paletot, le plia avec soin, le posa au pied d’un chêne et mit son chapeau dessus.

Pendant que les témoins chargeaient les fusils, un des amis de M. des Assins s’approcha de lui, et dit à voix basse :

« Je crois, mon cher, que tu ferais bien de renoncer à