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Page:Mercier - L’Habitation Saint-Ybars.djvu/209

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courage de l’accomplir, c’était alors Démon qu’elle sacrifiait ; elle détruisait son avenir, et répondait par une horrible ingratitude à toutes les bontés que la famille Saint-Ybars avait eues pour elle. »

Les cousines de Démon parlèrent à Blanchette dans le même sens. Elles la caressèrent ; elles lui promirent que dans l’intimité elles continueraient de la traiter sur un pied d’égalité. Elles l’engagèrent à venir chez elles ; il n’était pas convenable qu’elle restât plus longtemps sous le même toit que Démon.

De tout ce qui fut dit à Blanchette elle ne retint qu’une chose : c’est qu’en devenant la femme de Démon, elle le plaçait dans une position fausse et périlleuse. Pélasge le pensait aussi, se disait-elle, puisqu’il avait offert sa fortune à Démon, pour qu’il allât vivre à l’étranger avec Blanchette. Cette offre était bien un moyen de salut ; mais Démon ne l’accepterait jamais. Alors que faire ?…hélas ! se résigner à la destinée, se sacrifier par amour pour Démon. Telle fut, après bien des larmes, la conclusion à laquelle Blanchette s’arrêta.

Quand Démon s’aperçut du changement survenu chez Blanchette, il entra dans une violente colère contre sa tante et ses cousines ; il leur reprocha, dans les termes les plus amers, d’êtres venues chez lui pour travailler hypocritement à la ruine de son bonheur. Il leur déclara qu’il avait toujours eu les commérages en horreur, et que si l’on mettait dans un sac toutes les bavardes, jeunes et vieilles, qui s’occupent des affaires d’autrui, et qu’on les jetât au fleuve, il en serait charmé. Il sortit, étouffant de fureur, mais espérant qu’après un pareil éclat on se hâterait de quitter sa maison. Il n’en fut rien ; ces dames se firent un mérite, aux yeux de Blanchette, de supporter les outrages de Démon pour le sauver de l’abîme où le poussait son égarement.

Démon ne rentra qu’au soleil couchant. Il toucha à peine au dîner que Blanchette lui servit. Dans la soirée, il la prit à part, et lui demanda encore une fois si vraiment elle était décidée à ne pas s’unir à lui. Sa voix était douce ;