Page:Mercier - L’Habitation Saint-Ybars.djvu/28

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spéciaux, dix jardiniers, vingt domestiques pour le service de la maison, deux cents mulets, trente chevaux dont douze de luxe, une vacherie, des troupeaux de moutons et de chèvres, plusieurs basses-cours, un vivier, quatre colombiers, vingt-cinq chiens de chasse, un énorme dogue qu’on lâchait seulement la nuit, pour garder la maison.

Une discipline sagement raisonnée s’appliquait à tout le personnel de ce domaine, maîtres et esclaves. Saint-Ybars était sévère, mais juste. Malheureusement, il était sujet à des accès de colère, qui quelquefois étaient d’une telle violence qu’ils faisaient douter de sa raison et de la bonté naturelle de son cœur. Mais il était celui qui souffrait le plus de ses emportements ; car, à ses explosions de fureur succédait une tristesse amère qui durait une semaine. Il aimait tendrement son père, et le vénérait ; mais, à son tour, il exigeait que ses enfants, dont il se savait aimé, eussent pour lui-même le plus grand respect. Aussi, quand on le vit arriver avec Chant-d’Oisel, tous les membres présents de la famille allèrent-ils au-devant de lui, pour le saluer et l’embrasser.

La voiture s’arrêta sous un groupe de palmiers dont les tiges élancées montaient jusqu’au niveau de la balustrade du toit.

À la manière dont chacun caressa Chant-d’Oisel, Pélasge comprit qu’elle était la gâtée de la maison. Elle s’empressa de demander des nouvelles de Démon ; on lui apprit qu’il était sorti avec son trébuchet, pour attraper des papes.

Quelques minutes après le retour de Saint-Ybars, la première cloche pour le dîner sonna. Chacun se retira, pour refraîchir sa toilette. Un des frères de Démon conduisit Pélasge à la chambre qu’on lui destinait ; elle était située à l’extrémité de la galerie, à gauche, faisant face au fleuve.

Il la trouva entièrement de son goût. Après en avoir contemplé les détails avec plaisir, il s’avança sur la galerie, et parcourut du regard tout le tableau qui s’étendait entre la maison et le fleuve. Il vit deux hommes à cheval entrer dans l’avenue qu’il venait de suivre, quelques instants auparavant, avec Saint-Ybars et Chant-d’Oisel. À mesure