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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome IX, 1788.djvu/304

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animaux. Il n’est ni bon ni sage d’égorger l’agneau sous les yeux de l’enfance, de faire couler le sang des animaux dans les rues. Ces ruisseaux ensanglantés affectent le moral de l’homme, ainsi que le physique : il s’en exhale une double corruption. Qui fait si tel homme n’est pas devenu assassin en traversant ces rues, & en revenant chez lui les semelles rouges de sang ? Il avoit entendu les gémissemens des animaux qu’on égorge vivans ; & peut-être dans la suite fut-il moins sensible aux cris étouffés de celui qu’il avoit frappé.

Je reprocherai toujours aux Suisses d’égorger le porc devant leurs portes, de plonger leur couteau dans la gorge de l’animal devant les enfans assemblés, de recueillir le sang qui s’écoule, de renouveller ce spectacle autant de fois qu’il y a de maisons dans la ville, d’en faire une espèce de fête. Comment dans de si petites villes, lorsque les Suisses n’ont que deux pas à faire pour être dans la campagne, consentent-ils à remplir leur voisinage de ces cris perçans,