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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome V, 1783.djvu/259

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En entrant dans ces différens sallons on y entend les mêmes futilités ; répétitions uniformes, point de franchise ; toutes les opinions sont masquées, & ce n’est jamais au sallon que l’on s’explique. La nouvelle du jour se recommence à chaque visite ; on conte huit fois de suite la même histoire, & la politesse ordonne d’écouter tout ce que le bavard importun, qui s’est emparé de la conversation, se hasarde à dire.

Le sallon s’ouvre & se ferme soixante fois ; les noms entrent ; les robes & les habits s’examinent ; on garde le silence ; on s’esquive, on remonte en voiture pour aller trouver des personnes tout aussi indifférentes, & écouter dans un nouveau cercle ce qu’on sait déjà & ce qu’on a appris sans intérêt.

Cette vie ambulante & oisive, suite du désœuvrement, annonce le vuide profond du cœur & de l’esprit ; & c’est ainsi que se passe la vie des gens à équipage. Est-ce la peine d’être pourvu des avantages de la naissance