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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome V, 1783.djvu/85

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mon compere. De bons goûters doivent en résulter.

Des sensations que nous pouvons éprouver, la plus grossiere, à mon gré, est celle que nous procure notre palais. Les plaisirs des gourmands sont assurément les moins délectables de tous. Eh, qu’il faut plaindre le malheureux qui met là sa suprême volupté ! Cependant voyons encore la richesse & la magnificence de la nature envers ceux qui nous paroissent disgraciés par elle. Regardez un Chapelle, un Desyveteaux, (car je ne veux pas nommer le gros gourmand que j’ai sous les yeux ;) voyez cet ami joufflu de la table, qui goûte un mets ou une liqueur étrangere. Il considere l’objet & sa couleur ; il le flaire, il l’approche à plusieurs reprises de l’organe du goût ; il le retire, il ne se livre qu’avec attention à la volupté sensuelle. Voyez comme il prend une larme de la liqueur, comme il l’interroge sur le bout de sa langue, comme il la dépose sur le bord des levres ; toutes les houppes nerveuses étudient profondément la