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Page:Mercier - Tableau de Paris, tome VIII, 1783.djvu/351

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des biens de la terre, ayant une certaine abondance, sont exemptes de ces craintes de l’avenir, qui tourmentent le Parisien. L’inquiétude est son élément ; il regarde sa subsistance comme pouvant lui échapper le lendemain.

Ici l’habitant des montagnes, avec un peu de travail, s’approprie les richesses simples qui l’environnent ; il ne connoît point ces convulsions de l’ame, qu’enfantent les desirs trop vifs & les espérances trompées. Et comme tout est lié, comme le moral dépend du physique, la tranquillité du pays se réfléchit sur son visage calme. Les vices honteux n’approchent point sa cabane champêtre ; le lait de ses troupeaux semble garantir l’innocence de ses filles ; les forces de son esprit semblent visiblement combinées avec celles de son corps. Il n’a point le feu du génie ; mais il n’est pas soumis à de viles erreurs. Il méconnoît les arts brillans ; mais les préjugés nuisibles ne l’obsedent pas. Il ignore les jouissances vives ; mais il foule aux pieds les opinions extravagantes.