Page:Mercure de France, t. 147, n° 548, 10 avril 1921.djvu/101

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habituelle, où donc vaguait cette âme ? Où donc existait-elle ? — En un lieu terrestre ? Mais l’être spirituel d’un Empereur ne se peut point loger à la mesure d’une âme paysanne. Pas de choix possible, ni de bilocation. L’âme d’un Empereur réside, ou bien sous les Caractères dynastiques, ou bien au Ciel des Empereurs-Sages. Ceci est fort comme un axiome. Ceci ne peut pas ne pas être, dans l’Empire, ou bien l’Empire ne serait pas.

L’âme du Parfait Ancêtre Wen s’est donc retirée, — pourquoi, et pour combien de temps, au ciel des Empereurs. C’est là, bien au delà du Temple, des tombeaux, des formes et des signes qu’il me faut aller la joindre. Mais ici même le vertige reprend. Car il n’est pas question du Ciel des Élus, d’un paradis sphérique et simple où l’on monte tout droit, si l’on meurt en état de grâce ; après un détour, si l’on expire dans un moment d’impureté. Ici, personne ne vous tend les bras. Le chemin n’est pas unique. Il n’est pas multiple non plus. On ne peut pas, d’une ligne de pensée, réunir un point terrestre à un point donné du ciel ambiant. Sans doute, la Terre plate, immobile, solide, est le bon tremplin grossier d’où l’on saute au milieu du monde ; et sans doute aussi qu’à l’extrême, l’éther infiniment dur et cristallin, infiniment pur et joyeux tourne autour d’elle d’une vitesse infinie, globe de diamant noir que n’use pas même le frottement du Grand-Vide. — Tout cela est simple, aux deux bouts. Mais, d’un point à un autre, de la terre à la dix millième étape du chemin du monde, que la route de l’âme est peu imaginable ! Quelle danse des idées ivres ! Car les neuf zones, les neuf étages, les neuf firmaments dans les Cieux ne sont pas concentriques, mais enspiralés. Et il n’y a pas de rayons ! J’ignorais cet effroi géométrique.

Un temps. Ne pas souiller mes inductions célestes par une autre vision peu mystique, hélas. — Mes blonds visi-