Page:Mercure de France - 1896 - tome 18.djvu/55

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Svanhild

. — Et vois comme il est facile de vaincre

à deux, quand l’un est homme —

Falk

. — Et l’autre est pleinement femme ; — il est

impossible que deux pareils tombent !

Svanhild

. — Donc, debout pour la lutte contre les privations

et les soucis. (Elle montre l’anneau de Falk, qu’elle porte au doigt.) En cet instant je leur raconte tout !

Falk

(vite). — Non, Svanhild, pas maintenant ; attends

jusqu’à demain ! Ce soir nous cueillons les roses rouges du bonheur ; revenir aux choses journalières maintenant serait sacrilège. (La porte du salon s’ouvre.) Ta mère vient ! Cache-toi ! Comme ma fiancée aucun Tegard ne doit ce soir te rencontrer !

(Ils sortent entre les arbres près du pavillon. Mme Halm et Guldstad viennent sur la véranda.)

Mme Halm

.— Il s’en va vraiment !

Guldstad

. — Cela parait ainsi.

Styver

(arrive). — Il s’en va, madame !

Mme Halm

. — Oui, bon Dieu, — nous le savons bien.

Styver

. — Voilà une fâcheuse affaire. Il tient parole ;

je connais sa nature indomptable. Il nous met tous dans le journal ; ma fiancée sera imprimée à plusieurs éditions, avec les refus, les jumeaux et les ruptures. Écoutez, savez-vous, si ce n’était la honte, je proposerais un accommodement, un armistice —

Mme Halm

. — Vous croyez qu’il s’y prêterait ?

Styver

. — Oui, je crois. Il y a des indices, il y a certaines

choses qui montrent que lorsqu’il a eu le verbe si haut, il était en état d’ivresse. Oui, il y a une preuve qui, si elle n’est pas tout à fait décisive, du moins est très forte contre le prévenu ; il est rapporté sur lui que, après le repas, il se retira dans le domicile commun à Lind et à lui, et y montra une conduite tout à fait désordonnée, brisa en pièces — —

Guldstad

(voit une lueur de Falk et Svanhild, qui se

séparent, Falk remontant vers le fond ; Svanhild reste debout, cachée par le pavillon). — Halte, nous sommes sur la bonne voie ! Un instant, madame Halm ! Falk ne s’en va pas, et, s’il le fait, il le fait en ami.

Styver

. — Ah ? Croyez-vous aussi — ?

Mme Halm

. — Oh, où voulez-vous en venir ?

Guldstad

. — Pas plus loin, madame, qu’il ne faut ;

je vous expliquerai la chose à la satisfaction de tous. Rien qu’une minute de tête à tête —

Mme Halm

. — Soit !