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Page:Mercure de France - 1904 - Tome 52.djvu/614

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MERCVURE DE FRANCE—XII-1904

secrets magiques (les fameux « siddhis » dont il est tant question dans l’Inde) donnant à l’homme le pouvoir de commander à la matière sous toutes les formes qu’elle revêt : pierres brutes, nuages, animaux, impalpable éther, démons ou dieux.

Une action assez singulière le fit bannir des États de son père adoptif. Il foudroya plusieurs de ses compatriotes… Était-ce un malencontreux effet des connaissances occultes qu’il possédait déjà, mais dont l’application pratique ne lui était pas encore familière ?… On serait porté à le croire. Quoi qu’il en soit, il échappa à grand peine au supplice et seulement parce qu’il fut démontré que ses victimes avaient la conscience chargée de nombreuses et mauvaises actions. Une sentence d’exil fut rendue contre le maladroit apprenti thaumaturge. Lorsque ce jugement eut été prononcé, cinq Dâkinîs descendirent du ciel. Elles conduisaient un coursier prestigieux qu’elles amenèrent à Padmasambhava. Ce fut sur cette monture fantastique qu’il s’en alla, par le chemin des nues, vers le lieu où il devait préluder, par la retraite et les épreuves, à sa merveilleuse carrière d’apôtre et de magicien.

À ce départ, peu ordinaire, les légendes font succéder les aventures habituelles aux ascètes hindous : Padmasambhava acquiert la connaissance approfondie de toutes les langues, de tous les arts et de toutes les sciences[1], sans en excepter, bien entendu, la magie. Enfin, par mille travaux pénibles, et surtout par la puissance secrète dont il dispose, il conquiert une Dâkini et la possession de cette divinité achève l’initiation du héros. Cet épisode est, évidemment, symbolique.

Padmasambhava commence ensuite sa prédication. Ici, sa personnalité nous apparaît vraiment intéressante.

  1. On remarquera en passant que, contrairement à ce que nous constatons dans les religions occidentales, les Hindous, aussi bien que les peuples de race jaune, ne conçoivent point le type du saint ignorant à l’esprit borné. Chez eux la sainteté comprend, nécessairement, un vaste savoir et la perfection morale est le résultat d’une connaissance approfondie de la véritable nature des choses.