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Page:Meredith - L’Égoïste, 1904.djvu/25

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L’ÉGOÏSTE

passer subrepticement grâce au récit exagéré avec humour de son héroïque exploit, sorte d’excuse à son aspect. Cela ne pouvait se faire avec un marin de ce genre, déjà mûr et trapu. Par souci du decorum, on le congédie sur-le-champ, sans un mot. Cela fut accompli par un gentleman suprêmement avancé, dès l’âge le plus tendre, dans l’art de trancher au vif.

Le jeune Sir Willoughby en toucha un mot à Miss Durham. Et il se hâta d’ajouter : « Je lui enverrai un chèque », car à son regard de surprise, il vit bien qu’elle était scandalisée et que ses joues devenaient cramoisies.

La jeune dame ne répondit rien. Après le départ humilié du lieutenant Crossjay Patterne, disparaissant par l’avenue de tilleuls sous un nuage menaçant pluie, le cercle de lutins se resserra autour de Sir Willoughby, épiant ses moindres actes. Et s’il vous faut une comparaison, songez aux yeux de convoitise des singes encagés lorsqu’ils surveillent la main qui leur apporte pitance. Les lutins démoniaques observaient en lui un développement nouveau, une manifestation subtile de la vieille origine.