Page:Merlant - Bibliographie des œuvres de Senancour, 1905.djvu/12

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çu : la négation de toute métaphysique, de l’optimisme philosophique et du dogme de la perfectibilité, — la religion de la souffrance humaine et l’effort pour se concentrer vers ce seul but : faire rétrograder l’homme vers la nature. Mais il ne veut y mettre aucune méthode certaine ; il n’y a pas de progression dans l’ordre des Rêveries. Sénancour ne croit pas qu’il dépende d’un raisonnement serré d’arriver à la vérité : « Je veux me faciliter ses routes par l’habitude de me promener ça et la. » Ce n’est pas là, d’ailleurs, la flânerie nonchalante de Montaigne, mais le tâtonnement timide d’un esprit qui cherche ses sources, — et ne veut pas se fier à la logique.

l’écrivain, particulièrement dans les temps actuels. Motifs, difficultés, véritable but. Objet de la sagesse. Ce qu’il faut entendre ici par nature primitive de l’homme, etc., etc. » On voit là (ce qui apparaîtra de plus en plus nettement) que si Sénancour semble, d’après les dehors de sa vie, ôl re resté étranger a son temps, retiré de toute action, ce fut à son coips défendant. Il regrette d’èlre réduit à penser au lieu d’agir, de « travailler à une œuvre plus durable que nous et où notre existence paraisse se prolonger » (Inspiré des lettres 79 et 80 d’Obermann, sur la mission de l’écrivain). Dans une note, Sénancour, après s’êti-c défendu d’avoir des prétentions littéraires, répond aux calomnies de la Gazette de Fran ce ; —. ce journal ayant publié sur l’Amour un article très hostile (10 juillet 1808), il lui avait envoyé une lettre (6 août 1808) qui fut insérée avec des remaniements perfides. Sénancour tenait tellement à ce que sa note fût lue, qu’avant le titre de cette édition des Rêveries il plaçait cet avertissement : « Sur le livre de l’Amour, seconde édition, voyez la note première de ce volume, ci, p. 292 et suivantes. » Il y donne et sa véritable lettre, et celle qui lui fut substituée.

recherche de Sénancour ne suit pas la ligne droite, elle ne creuse pas, elle est diffuse. Il lient à faire entendre encore ici que s’il a écrit c’est faute de pouvoir agir. — On sent qu’il aurait voulu tirer, enfin, un livre de ses Rêveries ; à mesure qu’il perdait l’espoir de réaliser la grande œuvre dont il avait donné tant de fragments, il se voyait forcé, comme il l’écrivait en août 1822 (1), de mettre quelque importance à ce qu’il avait fait jusqu’alors. Les troisièmes Rêveries sont un livre absolument nouveau.

(1) V. Introduction.