Page:Merlant - Bibliographie des œuvres de Senancour, 1905.djvu/27

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Dans A et B, le plan général et les divisions sont les mêmes. Les « changements considérables » consistent surtout en amplifications. Dans B les titres sont souvent modifiés : Sénancour prend plaisir à souligner ce qu’il y a en eux de provoquant, de paradoxal. Ainsi, dans la section IV (des devoirs), A porte : « Si tout l’honneur des femmes consiste dans la chasteté » ; et B : « de l’erreur qui fait consister dans la chasteté tout l’honneur des femmes ». Dans la section VI (Usages), A porte : « Des plaisirs légitimes », et B : « des plaisirs dits légitimes ». Dans A la question de l’inceste était rejetée en note ; dans B elle est au long dans le texte. Sénancour combat plus nettement dans B que dans A contre la confusion courante entre les mœurs et les préjugés ; il aime à scandaliser les gens qui ont des pensées communes, en leur proposant des traits d’érudition inconvenante, comme Diderot. La fin de B est chargée d’additions, sur la sagesse individuelle et la force des obstacles à une réforme générale des mœurs.

La troisième édition (C) est précédée d’un avertissement de Vieilh de Boisjolin, l’ami de Sénancour. Les deux premières éditions, dit-il, ont été calomniées, sauf par quelques esprits élevés qui reconnaissent « les vues d’un philosophe profond, à la fois moraliste et législateur. » Il cite M. de BoufÏÏers qui disait de Sénancour, en 1808-9, qu’il « avait senti comme Sapho et s’était exprimé comme Jean-Jacques ». « On y trouvera de nombreuses améliorations et plusieurs articles inédits, dont un en particulier fort important et le plus étendu de tout l’ouvrage (Du Mariage ; seconde partie, Considérations particulières, p. 209-271). Quelques-unes des notes assez longues, qui se trouvaient à la lin du volume, ont été fondues dans le texte. » Enfin il prévient le public que l’ouvrage n’est pas ennuyeux malgré son titre philosophique ; ni prosaïque comme ceux de Gentil-Bernard et d’Ovide. — Du livre de VAmour, de Stendhal, paru en 1829, il n’est pas dit un mot.

Sénancour, présentant pour la troisième fois au public l’un de ses ouvrages qu’il estime le plus, a tenu à faire un nouvel avant-propos : « Peut-être servira-t-il (ce livre) à persuader quelques hommes dans le secret de la conscience : ce n’est pas tout ce qu’on eût désiré, mais c’est tout ce qu’on peut attendre. » La confidence sur les événements qui empêchent l’écrivain de produire est rejetée en note.