Aller au contenu

Page:Merrill - Les Quatre saisons, 1900.djvu/134

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


lui

Oui, donne tes lèvres, et tes mains, et tes seins, ô femme !
Je veux dormir ; je crois en toi ; la nuit tombe. Nous sommes
Deux pauvres amants qui cherchons dans nos yeux nos âmes.
Bientôt, comme nous, dormiront tous les hommes.

elle

Pourtant, non ! Je ne puis dormir. Tes paroles m’ont fait mal.
Ne serions-nous vraiment que des voyageurs dans la nuit
Qui se disent un mot, se touchent les doigts, puis s’enfuient,
Cherchant l’auberge inconnue par mont et val ?

lui

Tu dis des choses secrètes. Écoute : j’entends ta voix,
Je sens ta forme, je sais la saveur de ta bouche,
Je respire le parfum de ta chair, et tes yeux je les vois ;
Et pourtant je ne te connais pas, toi qui partages ma couche !

elle

Oh ! moi, je te connais, ne fût-ce que par ta pensée
Qui s’éloigne de moi comme de la beauté des roses,
Et cherche aux formes une réalité insensée,
Alors qu’en toi-même gît le secret des choses.