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CHEZ LAVOISIER

maux ou végétaux, était même sans effort d’interprétation homogène et hiérarchique, il ne put en être ainsi de la classification des réactifs chimiques qui ne décèlent leur nature et leurs propriétés qu’en se modifiant, et en modifiant les autres réactifs mis à leur contact. Les classes déjà bien connues et constamment étudiées des métaux, des acides, des alcalis, des sels, des terres, etc., se définissaient par certains nombres de qualités ayant des rapports plus ou moins hypothétiques avec l’origine ou la composition des divers corps qu’elle renfermait.

La classe des métaux a longtemps paru la plus naturelle de toutes ; ces corps qui se caractérisent par leur pesanteur (densité) très élevée, leur opacité, leur bel aspect ont des propriétés communes ; l’ensemble d’entre eux, c’est une constatation d’expérience, (je n’ose dire expérimentale) forme un groupe homogène de corps. Or comment expliquer l’existence de ce groupe ? les alchimistes, les chimistes, les mineurs, les métallurgistes, les philosophes s’y appliquèrent spontanément et inventèrent de belles hypothèses sur lesquelles nous ne devons pas insister concernant l’origine, les tendances à la perfection, la coction ou la maturité des matières appartenant au règne métallique. La plupart de ces suppositions et notamment la réussite des transmutations furent contestées au xviiie siècle et Boerhaave que nous avons déjà eu l’occasion de citer les élimina de sa chimie. Cependant, et cela est à remarquer, Boerhaave attribue une grande importance aux métaux ; il crut que ces complexes étaient formés au moins de deux ingrédients : un principe métallisant ou mercure leur imposant leurs propriétés génériques, un principe caractéristique de chacun d’eux permettant de les différencier et de les appeler, or, argent, cuivre, étain, etc. Les transmutations plus ou moins légendaires, si elles étaient réelles se réduiraient à ce que la chimie moderne nomme des déplacements. « On n’est donc pas fondé à soutenir que les métaux peuvent être aisément changés les uns dans les autres, excepté à l’égard de leur partie mercurielle… Ainsi par transmutation l’on ne pourrait pas tirer plus d’or d’un métal qu’à proportion du mercure qui entre dans sa composition ». En conséquence, ajoute Boerhaave « ceux-là se trompent grossièrement qui cherchent à convertir en métal une matière non métallique »[1].

  1. Newton, Stahl, Boerhaave, p. 203.