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AGI

qu’on appellerait ingénieuses, s’il était possible d’y voir autre chose que les rêves d’un esprit égaré par la manie des systèmes. La collection des livres saints réputés prophétiques, traduits et interpréta par le président Agier, est fort peu connue, l’auteur l’ayant fait imprimer tout entière à ses frais, a un nombre peu considérable d’exemplaires[1] ; ce qui nous a engagés à en parler avec quelque détail. On a mis dans la liste des ouvrages du président Agier, sans reconnaître toutefois qu’il en fût l’auteur, une Justification de Fra Paolo Sarpi, ou Lettre d’un prêtre italien à un magistrat français sur le caractère et les sentiments de cet homme célèbre, Paris, 1811, in-8o. Cette justification d’un prêtre soupçonné, non sans fondement, de protestantisme (voy. Sarpi), a pour auteur un prêtre italien, ennemi non moins ardent des jésuites et de la cour de Rome, appelé Eustache Degola. Agier, auquel il l’adressa, n’en fut, dit-on, que l’éditeur ; mais, au rapport de son panégyriste, « il a publié ces lettres avec d’autant plus de soin et d’empressement qu’on lui avait reproché de s’être prévalu, dans son Traité du mariage, de l’autorité de Fra Paolo, pour rejeter certaines décisions du concile de Trente. On accusait cet auteur de tendre au protestantisme, et l’on s’appuyait de l’imposante autorité de Bossuet. Il importait donc de le laver de ce reproche, et sous ce rapport, la justification de Fra Paolo peut être considérée comme une pièce justificative du Traité du mariage. » Agier avait été chargé, en 1787, par le gouvernement, de préparer une nouvelle édition du texte original français des Arrises du royaume de Jérusalem, qui n’a été publié qu’une seule fois, par Thaurnac de la Thaumassière (voy. ce nom), à la suite de ses Notes sur la coutume de Beauvoisis, Bourges et Paris, 1890, in-fol. La république de Venise fit faire à cette occasion, sur peau de vélin, une copie fac-similé du manuscrit qui est conservé à Venise, et en fit présent au roi de France. Cette copie est aujourd’hui déposée à la bibliothèque royale. Le travail d’Agier n’était encore que très-peu avancé quand il y renonça, et les matériaux qu’il en a laissés sont entre les mains de sa famille[2]. Il avait eu part à la nouvelle édition donnée par Camus, Bayard et autres, de la Collection des décisions nouvelles relatives à la jurisprudence, pars J.-B. Denisart, Paris, 1783-1790, 9 vol.


in-4o, qui n’a pas été terminée. De 1818 à 1821 il a coopéré avec Lanjuinais, Grégoire, Tabaraud (voy. ces noms) et quelques autres écrivains de la même école, à la rédaction de la Chronique religieuse, journal mensuel dont la collection forme 6 volumes in-8o. La brochure intitulée La France justifié de complicité dans l’assassinat du duc de Berry, ou Réflexions sur le mandement de Mgr. le cardinal-archevêque de Paris, relativement au service pour le repos de l’âme de prince, 1820, in-8o, est l’imprimé à part d’un article inséré par le président Agier dans ce journal. M. Dupin jeune, avocat, a donné, dans l’Annuaire nécrologique de M. Mahul pour 1823, une notice sur Agier, qui est exacte et complète, mais très-louangeuse ; n en trouve le correctif amer dans l’Ami de la religion et du roi. Entête du Catalogue des livres de la bibliothèque de feu M. Agier, Paris, Dehansy, 1824, in-8o, de 14 et 47 pages, on a placé des aperçus sur sa vie et ses ouvrages, rédigés par un de ses amis. F-ll.


AGIER (Charles-Gui-François), cousin du précédent, ancien membre de l’assemblée constituante, naquit à Niort, le 24 août 1753. Il exerçait, avant la révolution ; les fonctions de lieutenant général de la sénéchaussée du Poitou et de procureur du roi à St-Maixent. Le tiers état de sa province le nomma, en 1789, député aux états généraux, et s’il se distingua peu dans cette assemblée, on eut lieu d’y remarquer au moins sa modération et son utile coopération aux travaux des comités. Il ne prit la parole que dans les discussions qui purent intéresser particulièrement la sénéchaussée de Poitou, qu’il représentait ; il vota pour la suppression des ordres monastiques, fit substituer le nom de communes a celui de paroisses, se déclara pour la non-responsabilité des officiers municipaux, et après le voyage de Varennes, combattit la proposition de Robespierre, qui demandait que le roi fût mis en jugement. Il fut nommé, après la session de l’assemblée constituante, membre de la cour de cassation ; mais le danger des circonstances le détermina à refuser ces fonctions et a retourner dans sa province ; il fut incarcéré sous le règne de la terreur. Le gouvernement consulaire le nomma, en 1800, commissaire près le tribunal civil de Niort, place qu’il échangea, après le retour de la maison de Bourbon, contre celle de procureur du roi près la cour royale de cette ville. Agier est mort à Niort en 1828. — Son fils, conseiller à la cour royale de Paris, a été membre de la chambre des députés pour le département des Deux-Sèvres. F-ll.


AGILA, roi des Visigoths en Espagne, fut porté sur le trône, en 549, par des seigneurs conjurés qui, sans attendre ni demander le consentement de la nation, le proclamèrent à la place de Théodisèle qu’ils avaient égorgé. Cette odieuse usurpation irrita les Visigoths, le peuple le plus fier et le plus libre qu’il y eût alors en Europe ; et la guerre civile commença par le soulèvement de Cordoue. Agila rassemble aussitôt une armée et assiège cette ville ; mais il est forcé de se retirer, après avoir vu ses

  1. Avant de se décider à la publier, Agier fit imprimer a cent exemplaires, comme spécimens, les explications de quelques leçons des prophètes qu’on fit dans nos églises, aux solennités de Noël, de Pâques et de la Pentecôte. Ces spécimens, annoncés dans les journaux à 5 sous le volume, et exposés en vente dans les places publiques à l’approche des fêtes, ne se vendirent point ; un si fâcheux essai dégoûta les libraires ; et le président Agier, pour rendre public un travail estimable qui lui avait couté plusieurs années de veilles et de fatigues, se vit réduit à faire imprimer cette collection à ses dépens
  2. Le projet de publier ce curieux monument de la jurisprudence du moyen âge fut repris, il y a quelques années, par le gouvernement. M. Pardessus et M. Guérard, membres de l’Académie des inscriptions et belles lettres, ont été chargés d’en donner une nouvelle édition. Ce travail important, dont il n’a été imprimé qu’un court spécimen, n’est pas abandonné.