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ANGE DE LA BROSSE, de Saint-Joseph (le Père), plus connu sous le nom de Père Ange de Saint-Joseph, natif de Toulouse, carme déchaussé, missionnaire apostolique en Orient, et supérieur des missions de son ordre dans la Belgique, était très-familiarisé avec la langue persane vulgaire ; mais ses connaissances littéraires n’étaient pas, à beaucoup près, aussi étendues qu’on pourrait l’imaginer d’après les éloges que Chardin lui donne, non-seulement dans son voyage, mais encore dans l’approbation qu’il joignit au Gazophylacium linguæ Persaru Amsterdam, 1684, in-fol. De nombreuses inexactitudes déshonorent ce dernier ouvrage, d’ailleurs curieux et utile. Quant à la Pharmacœpa persica, publiée par le même missionnaire en 1681, en un vol. in-8o, à Paris, le docteur Hyde atteste qu’elle a été traduite du persan par le P. Matthieu, dont le P. Ange a tu le nom, sans oser pourtant y substituer ouvertement le sien, placé cependant en caractères persans sur le titre de l’ouvrage ; ce même nom est en caractères romains en tête de la dédicace adressée au général des carmes déchausses ; le style de la préface qu’il a ajoutée, et le genre des nombreuses approbations qui accompagnent cet ouvrage, tout concourt à favoriser la supercherie littéraire de notre religieux. Il fut impitoyablement dénoncé par le docteur Hyde, qui entreprit de justifier et de venger les savants éditeurs du texte persan de la Polyglotte de Walton, injustement, et surtout bien maladroitement attaqués par un trop faible adversaire. (Voy. Pharmacopæa persica, p. 38-51, prœfat. Castigation. in Angelum a S. Joseph, alias dictum de la Brosse, p. 292-308, du Syntagma dissertattionum quas olim Thomas Hyde separatim edidit, etc., vol. Ier.) Le suffrage de Bernier, de Pétis de la Croix et de Chardin, a dédommagé notre missionnaire de la critique acerbe, mais souvent fondée, du docteur anglais. L-s.


ANGE DE SAINTE-ROSALIE, augustin déchaussé de la maison des Petits-Pères, né à Blois en 1655, mort ai Paris en 1726. On le destinait dans son corps à professer la théologie ; mais un goût particulier l’entraînait vers l’étude de l’histoire, et surtout de cette partie de l’histoire qui se compose de pièces diplomatiques, de chartres et d’ordonnances ; on lui laissa la liberté de s’y livrer, et il passa une partie de sa vie à dérouler les vieux titres de notre histoire, et l’autre a transcrire ce qu’il y avait remarqué de plus curieux. Il avait été précédé dans ces études, dont on ne peut concevoir l’attrait dans le tourbillon du monde, par le P. Anselme (voy. Anselme), qui lui laissa de riches matériaux ; il les mit en ordre, les grossit de ses propres recherches, et du tout il composa l’Histoire de la maison de France et des grands officiers de la couronne, en 9 vol. in-fol., ouvrage d’une grande érudition, mais d’une d’illusion et d’une longueur insupportables, et dans lequel les historiens Velly, Garnier, Hénault ont puise, sans scrupule, la partie de leur science la plus difficile, et en même temps la plus propre à donner à leurs récits le caractère d’authenticité qui inspire tant de confiance. Le P. Ange a publié en outre, avec les même éléments et les débris de sa grande Histoire de la Maison de France, un État de la France, en 5 vol. in-12, ouvrage dont Nicolas Besogne et Louis Trabouillet, chapelain du roi et chanoine de Meaux, avaient conçu la première idée, que le P. Ange développa sur un paln plus étendu, et auquel les religieux bénédictins de la congrégation de St-Maur mirent la dernière main en 1749, en le publiant avec des augmentations, en 6 vol. in-12. Cet État de la France est curieux, en ce qu’il contient, aussi exactement que possible, l’origine, la nature, les prérogatives de tous les officiers ecclésiastiques, civils et militaires de la couronne, avec le cérémonial de leurs fonctions et l’état de leur appointements. Le nom de famille du P. Ange de Sainte-Rosalie était François Vaffard. G-s.


ANGE (Rocca). Voyez Rocca.


ANGÈLE-MÉRICI (la Mère) ; fondatrice des ursulines, connue aussi sous le nom de La bienheureuse Angèle de Brescia, était née en 1511, à Desenzano, sur le lac de Garda, d’une famille d’artisans. Elle perdit fort jeune son père et sa mère, et resta sous la tutelle d’un oncle qui favorisa son penchant à la dévotion. Sa sœur aînée partageait les pieux exercices auxquels elle aimait à se délivrer. Toutes deux passaient une partie des nuits en prières, et pratiquaient des austérités surprenantes pour leur âge. Elles s’enfuirent un jour dans l’intention de se réfugier dans un ermitage ; mais leur oncle les atteignit en chemin et parvint à les détourner de ce dessein. Quelque temps après, Angèle perdit cette sœur chérie, qu’elle regardait comme son guide, et dès lors elle ne songea plus qu’à quitter un monde ou elle se trouvait sans appui. Elle prit l’habit du tiers-ordre de St-François, et ajouta de nouvelles austérités a celles que prescrivait la règle. Elle n’avait aucun meuble dans sa cellule, ne vivait que de pain et de quelques légumes cuits à l’eau, portait jour et nuit un cilice, et couchait constamment sur la dure. Cependant elle désira visiter les lieux saints. À son retour de la Palestine, elle s’arrêta à Rome pour satisfaire sa dévotion, et revint enfin à Brescia, où elle jeta, en 1537, les fondements de l’ordre de Ste-Ursule. Le but de cet institut était la soulagement des pauvres et des malades et l’instruction des enfants. La vénérable fondatrice voulut que ses filles restassent chez leurs parents, persuadés que leur exemples serait utile au monde ; mais, dans les statuts qui furent soumis à l’apprabation du saint-siége, elle prévit que cette règle pourrait être modifiée selon les temps et les lieux ; et c’est ce qui arriva, puisqu’il existait en France plusieurs couvent d’ursulines cloitrées[1]. Angela, quoiqu’à peine âgée de vingt-six ans, fut élue première supérieure de l’institut ; elle le gouverna avec beaucoup de sagesse, et mourut en odeur de sainteté le 21 mars 1540. La vie d’Angèle Mérici a été écrite en italien par le P. Ottavia de Flamie, Brescia, 1600, in-4o. On peut encore consulter l’Histoire des ordres monastiques, etc., par Hélyot, t. 4, p. 150-57. W-s.

  1. Il y en avait cent quinze (compris celui de Québec) dépendant de la congrégation de Paris, et divisés en onze provinces (Doujat, specimen jur. eccles., ou la Clef du grand pouillé de France, p. 383.)