Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 19.djvu/12

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• ua : plume du poëte des combinaisons stratégiques d’un général d’armée. Enfin on pourrait dire que c’est la naïveté de La Fontaine avec une admiration plus pure de la nature et du Créateur, un sentiment plus intime des charmes de la vie champêtre. Un écueil de ce genre de poésie, c’est le danger d’exagérer la naïveté et de tomber dans le trivial. Hebel a rarement un pareil tort ; le langage dont il s’est servi contribue d’ailleurs à le couvrir en plusieurs endroits. Aussi, traduites en allemand, ces pastorales perdent beaucoup de leur prix : il faut les laisser dans la bouche des paires de l’Oberland. Du reste on ne peut y méconnaître un grand talent descriptif. On regarde comme les meilleurs de ces essais la Matinée du dimanche, le Salut de la nouvelle année, l’orage, Iàaile du berger, la Wière, et quelques autres. Hebel s’essaya aussi dans la poésie allemande ; mais là il resta fort au-dessous du poëte allé manique. Ses succès dans ce dernier genre excitèrent d’autres poëtes allemands à chanter dans les patois de leur pays : aucun’ne put atteindre à la touchante simplicité de Hebel, et toutes ces imitations furent bientôt oubliées. En 1808, le directeur du lycée de Carlsruhe se chargea de la rédaction d’un almanach populaire, Der rbein-Iœndùehe Hauqûemd, et se servit habilement de sa bonhomie et du ton simple qui lui était familier, pour inculquer au peuple des leçons salutaires, ou pour détruire des préjugés absurdes. Malheureusement il fut obligé de traiter aussi de la politique dans cet almanach ; et comme le gouvernement badois n’osait être d’un autre avis que Napoléon, Hebel ne put que traduire en style populaire la politique altière du Moniteur et les bulletins hyperboliques de la grande armée. On s’étonne que le naïf poëte des montagnes ait pu se prêter à vanter le régime militaire d’alors. En 1815, une anecdote qu’il avait insérée dans son almanach déplut aux catholiques de Bade, ils s’en plaignirent ; l’anecdote fut supprimée dans les exemplaires restants, et Hebel cessa de réüger l’almanach, qui, sous sa direction, avait eu une vogue telle que l’éditeur en débitait trente à quarante mille exemplaires par an. En 1811, il quitta l’enseignement pour entrer dans le conseil supérieur des églises et écoles. Son recueil d’histoires bibliques pour les écoles protestantes de Bade parut en 1818. On y retrouve un grand talent de narrer et de se mettre à la portée des moindres intelligences ; cependant on peut y blâmer diverses interprétations peu conformes au dogme établi, ainsi que la tendance vers une simplicité autre que celle de la Bible. Dans la suite le consistoire se crut obligé de procéder à une édition purgée du même recueil. En 1819, Hebel reçut de son gouvernement le titre de prélat : c’était la place la plus éminents du clergé protestant, avec le droit de siéger dans la première chambre du corps représentatif. Dès lors il prit part aux travaux de diverses sessions,

Slis : 7 sans pourtant s’y distinguer. La politique n’était ’ pas plus de son goût que les dignités et les honneurs, et que la vie brillante qu’il fut obligé de mener. Dans les salons ministériels, il regrettait les coteaux et les prés de son pays natal. « Vivre e et mourir comme pasteur d’un paisible village e parmi de bonnes gens, disait-il, est tout ce que j’ai désiré jusqu’à cette heure. dans les moments les plus agréables, ainsi que dans les moments e les plus tristes de ma vie ; » et, voulant peutètre se faire illusion, il composa en 1820 un sermon dïnaufguration comme pasteur de village. En 1826, peu ant qu’il était en tournée pour inspecter les établissements d’instruction publique, en se rendant de Manheim à Heidelberg, de vives douleurs d’entrailles l’obligèrent de s’arrêter à Schwetzingen ; il y mourut le 22 septembre et fut enterré dans le cimetière de cette ville. Une couronne de lauriers et la croix de commandeur de l’ordre de Zœhringen servirent d’ornement à son cercueil. Dans un bosquet du parc de Carlsruhe on voit son buste en bronge sur un socle. portant cette inscription : « à Jean-Pierre Hebel, né le 10 mai 1760, mort le 22 septembre 1826, ’ au poëte national ; érigé par ses amis et admirateurs, sous le règne du grand-duc Léopold, 1835. » Une édition complète de ses QEuvre :, avec son portrait et une notice biographique, a été imprimée à Carlsruhe, 1832-34, 8 vol. in-8°. Elle comprend dans les trois premiers volumes ses poésies allé maniques et les contes populaires qu’il a faits pour l’almanach badois ; et dans les volumes quatre à sept les histoires bibliques, le catéchisme chrétien et ses sermons qui ne s’élèvent pas jusqu’à l’éloquence ; enfin le huitième volume se compose de mélanges. Il faut dire que dans ses dernières années Hebel n’avait composé d’autres poésies que des charades et des logogriphes. Une montagne qui domine la jolie vallée de la Wiese, chantée par le poëte, a reçu son nom (Hebelrhœhe) ; le naturaliste Gmelin a appelé un genre du règne végétal, établi par lui, Hebellia, et une espèce de ce genre Allenumiu. D-c.

HEBENSTREIT (Inn-Eannsr), médecin et voyageur allemand, naquit le 15 janvier 1701 à Neustadt-sur-Orla en Saxe. Il était d’une famille pauvre. Après avoir fait ses études à Iéna, il alla chercher fortune à Leipsick, où il fut recommandé par Rivinus le botaniste à un riche négociant, qui le chargea du soin de ses plantes rares. Hebenstreit prit ses degrés en médecine ; et, grâce à des protecteurs que son mérite lui avait acquis, il fut choisi par le roi Auguste I•’pour faire, avec quelques autres personnes, un voyage en Barbarie. Il partit, le 23 octobre 1731, pour llarseille, où il s’embarqua le 24 janvier 1732. Le 16 février, il était à Alger. Il y gagna les bonnes grâces d’un fils du ey, qui lui procure des facilités pour voyager dans l’intérieur du pays. Il fit, avec quelques-uns de ses compagnons et le voyageur anglais Shaw, cette course qui