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s’il ne provenait d’un homme de mœurs très-simples, qui, dans sa vie solitaire, rapportait tout à la Divinité. C’est aussi par sa manière d’exister simple, frugale et laborieuse, qu’on peut expliquer comment il a pu amasser une somme de mille livres sterling qu’on trouva chez lui après sa mort, arrivée le 21 juin 1755. Il légua ses manuscrits au docteur G. Bedford : celui-ci les vendit pour cent guinées au docteur Karolinson ; et en vertu du testament de ce savant, ils passèrent à la bibliothèque Bodléienne à Oxford. On y trouve toute la correspondance de Hearne, et une espèce de journal qu’il avait tenu de ses travaux archéologiques. Ces manuscrits forment, à ce qu’on assure, cent petits volumes. On peut voir dans le Dictionnaire de Chaufepié la liste des ouvrages publiés par cet infatigable écrivain, au nombre de quarante, indépendamment des tables qu’il avait pris la peine de faire pour divers ouvrages. Nous indiquerons seulement les suivants : 1° Reliquiae Bodleianae, ou Œuvres posthumes de sir Thomas Bodley, avec le premier projet de statuts de la bibliothèque publique d’Oxford, Londres, 1703, in-8o(en anglais); 2° Justinus. avec des notes, Oxford, 1705, in-8o, collationné sur quatre manuscrits ; 3° Livius, ibid., 1708, 6 vol. in-80, édition assez estimée ; 4° Lettre sur quelques antiquités entre Windsor et Oxford, 1725 ; 5° Vie d’Alfred le Grand, par L. Spelman, imprimée sur le manuscrit original de la bibliothèque Bodléienne, 1710; 6° Itinéraire de Jean Leland, antiquaire, accompagné de plusieurs discours curieux, 1710, in-8o; édition rare, n’ayant été tirée qu’à cent vingt exemplaires : on l’a réimprimée en 1744 ; 7° H. Dodwell de panna equestri Woodwardiana dissertatio, Oxford, 1713, in-8o. Hearne fut obligé de faire plusieurs cartons pour la préface après la publication de l’ouvrage. 8° Lelandi de rebus Britannicis collectanea, 1715, 6 vol.; tiré à cent cinquante exemplaires ; 9° Acta Apostolorum grœco-latine, litteris majuscules, e codice Laudiano…, Oxford, 1715, in-8o ; tiré à cent vingt exemplaires ; 10° J. Rossi, antiquarii Warwicensis, Historia regum Angliœ, 1716, in-8o, tiré à soixante exemplaires ; réimprimé dans la 2e édition de l’itinéraire de Leland ; 11° Alvredi Beverlacensis annales, sire historia de gestis regum Britauniœ, 1716, in-8o; tiré à cent quarante-huit exemplaires, de même que le suivant ; 12° G. Koperi vita D. Thomas Mori, 1716; 13° Recueil de dissertations curieuses écrites par des antiquaires distingués, sur divers sujets d’antiquités anglaises, 1720; 14° Roberti de Avesbury Historia de mirabilibus gestis Edwardi III. Hearne y a joint des lettres de Henri VIII à Anne Boulen, 1720; 15° Th. Caii vindiciœ antiquitatis academiœ Oxoniensis, contra Johannem Caium ; in lucent ex autographo emisit Thom. Hearnius, porro non tantum Antonii vitam a se ipso conscriptam, et Humphredi Humphreys, episcopi nuper Herefordiensis, de viris claris Cambro-Britannicis observationes, sed et reliquias quasdem ad familiam religiosissimam Ferrariorum de Gidding parva in agro Huntingtoniensi pertinentes subnexuit, Oxford, 1750, 2 vol. in-8o (voy. FERRAR). Cette histoire des antiquités de l’université d’Oxford, par Th. Key (voy. CAIUS), est curieuse et recherchée. Hearne s’est presque toujours borné au rôle d’éditeur. Mais dans beaucoup d’ouvrages publiés par ses soins, il a inséré des dissertations savantes sur toute sorte de sujets. Dans ses préfaces, il déclame souvent contre le vandalisme des premiers réformateurs, et rend plus de justice que la plupart de ses compatriotes aux chroniques et aux compilations faites dans les monastères. Aussi l’a-t-on soupçonné d’avoir vécu et d’être mort dans la communion de l’Église romaine ; depuis vingt ans on ne le voyait plus au service divin dans l’église anglicane, et avant ses derniers moments, il reçut secrètement un inconnu que l’on a cru être un prêtre catholique déguisé. Par une disposition assez bizarre de son testament, après avoir légué à un ami son cabinet de monnaies et médailles, il ajoute : « Et je souhaite qu’en quelques mains qu’elles puissent tomber dans la suite, on les conserve toutes ensemble, et qu’on ne les montre jamais qu’à des personnes qui s’y entendent. » L’histoire d’Angleterre doit à Hearne un grand nombre de titres et de chartes qui, sans ses recherches laborieuses, n’auraient peut-être jamais vu le jour ; quelques-uns des manuscrits dont il fut éditeur ne méritaient peut-être guère l’honneur de la publicité ; mais c’est le plus petit nombre ; tous les autres sont assez intéressants pour que les Anglais doivent lui savoir gré d’avoir tiré ces ouvrages de l’obscurité. Un libraire de Londres a commencé, vers le commencement de ce siècle, à réimprimer la collection des œuvres de Hearne, qui pour la plupart sont devenues rares, et se payaient très-cher dans les ventes publiques ; mais, faute d’encouragements, il a été obligé d’abandonner cette entreprise. Huddesford a composé la vie de Hearne, en prenant pour guide le journal même écrit de la main de ce savant antiquaire ; et il l’a publiée en 1772 avec celles de Leland et de Wood, en 2 volumes in-8o.

D—G.

HEARNE (Samuel), voyageur anglais, naquit en 1745. Le peu d’inclination qu’il montrait pour l’étude, et l’ardeur qu’il témoignait pour la profession de marin, engagèrent sa mère, restée veuve, à le conduire elle-même à Portsmouth quand il n’était encore âgé que de onze ans. Il s’embarqua sur le vaisseau du capitaine depuis lord Hood. On était alors en guerre ; Hood ne tarda pas à combattre, et fit plusieurs prises ; il dit à Hearne qu’il aurait sa part du butin ; celui ci le pria de tout donner à sa mère, qui saurait mieux l’usage qu’il conviendrait d’en faire. À la fin de la guerre, Hearne voyant qu’il avait peu d’espoir d’avancement dans cette partie, quitta la marine royale, et entra au service de la compagnie de la baie d’Hudson. Son activité, son intelligence, un vif désir d’entreprendre quelque découverte