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lui importait peu, et il était souvent dupe de tous ceux qui ne mettaient point de bornes à leur avidité. Voulant faire de Lacknaw une capitale magnifique, il recherchait ardemment tout ce qu’il y avait de singulier, de remarquable ailleurs. Informé par un de ses ministres, qui revenait de Calcutta, que le fort William était la merveille de cette ville, il voulut avoir un fort William à Lacknaw, et l’on eut beaucoup de peine à le faire renoncer à ce bizarre dessein. Aucun souverain de l’Europe n’aurait pu égaler son faste. On évaluait ses bijoux à 200 millions. C’est dans l’Ina-Khaneh, un de ses palais, que l’on voyait encore quelques années après sa mort une partie des objets précieux qu’il y avait déposés : des estampes anglaises, richement encadrées, des ornements et des dessins chinois, des lustres, des glaces de toutes les formes et de toutes les dimensions, dont quatre, les plus grandes que l’on connaisse, avaient onze pieds et demi de haut sur six pieds de large ; des pendules, dont plusieurs enrichies de pierres précieuses, etc. Même faste dans ses parties de chasse où il employait 1,500 éléphants, 150 pièces de canon ; dans ses fêtes civiles et religieuses, ou l’on ne se servait que de vases d’or et d’argent, et où il dépensait chaque fois 500,000 fr. Assef-ed-Doulah avait fait construire à Lacknaw une porte sur le modèle d’une de celles de Constantinople, et une mosquée dans laquelle était son tombeau en marbre blanc, surmonté d’un dais en drap d’or. Il avait légué cent roupies (275 fr.) par jour pour quarante faquirs qui devaient y lire le Coran et prier pour lui. Ce nombre, ainsi que la dépense, furent réduits au quart par un des successeurs de ce prince. La mosquée était éclairée à l’extérieur par une multitude de réverbères, et en dedans par des milliers de girandoles en verres de couleurs, garnies de bougies. Les sommes qu’Assef-ed-Doulah avait dépensées à Lacknaw en firent l’entrepôt du commerce du Bengale et de Cachemire, et l’une des plus riches et des plus grandes villes de l’Inde. Il y rassembla les matériaux des Sept-Mers, dictionnaire et grammaire en persan, qu’un de ses successeurs y a fait imprimer, 1812-1822, 7 part. in-fol. A-t.


ASSELIN, bourgeois de Caen. Voyez Guillaume le Conquérant.


ASSELIN (Gilles-Thomas), docteur de Sorbonne, né à Vire, en 1682, fit ses études à Paris, et mérita d’être distingué par Thomas Corneille. Il se montra le digne élève de l’auteur d’Ariane, en remportant le prix de poésie à l’Académie française en 1709. Il publia, en 1725, un petit poëme médiocre sur la religion. Ses odes sur l’existence de Dieu, le mépris de la fortune, la foi et la paix du cœur, toutes couronnées aux jeux floraux, ont quelquefois la pompe et la richesse du genre. La touchante élégie que lui inspira la mort de Thomas Corneille fut également couronnée aux jeux floraux. Nommé ensuite principal du collège d’Harcourt, Asselin consacra tous ses moments à ses nombreux élèves, donna une nouvelle activité aux études et fit des réformes utiles. Il mourut à Issy, où il s’était retiré, le 11 octobre 1767. Ses œuvres poétiques, suivies d’un discours pour disposer les déistes à l’examen de la vérité, ont été imprimées à Paris en 1775, 1 vol. in-8o. Le tome 8 de l’Année littéraire de Fréron contient une notice sur l’abbé Asselin. L. R-e.


ASSELINE (Jean-René), évêque de Boulogne, fut un des plus savants prélats de son temps. Né à Paris en 1742, dans une condition humble, il s’éleva par son seul mérite. Il fit ses études avec distinction au collège de Navarre, et obtint le prix d’honneur au concours de l’université. Entré au séminaire des Trente-Trois, il suivit le cours des études théologiques, se fit admettre en Sorbonne, et fut le premier de sa licence. Ses succès le firent nommer, jeune encore, à la chaire d’hébreu fondée en Sorbonne par le duc d’Orléans, et la manière dont il s’acquitta de ses fonctions justifia un choix qui eût pu sembler prématuré. Dans les réunions des docteurs de Sorbonne, on remarquait son savoir et sa sagesse. Sa chaire ne l’empêchait pas de se livrer à l’exercice du ministère ecclésiastique, quoique rien ne l’y obligeât. M. de Beaumont, archevêque de Paris, l’attacha à son administration, en le nommant grand vicaire, et M. de Juigné lui donna la même marque de confiance. M. de Pontpignan, archevêque de Vienne, étant devenu ministre de la feuille en 1789, proposa Asseline pour l’évêché de Boulogne, qui venait de vaquer. Nul choix ne pouvait être en même temps plus judicieux et plus populaire. Asseline fut sacré le 5 janvier 1790, et se rendit sur-le-champ dans son diocèse. Bientôt la gravité des circonstances où se trouvait l’Église de France vint fournir matière a son zèle. Il fut un des premiers à combattre les innovations de l’assemblée constituante. Son instruction pastorale du 24 octobre 1790 fut adoptée par un grand nombre d’évêques. L’année suivante le prélat fut obligé de se retirer en Flandre, d’où il passa en Allemagne quand les Français envahirent les Pays-Bas. Il ne cessa, pendant son exil, d’entretenir des relations avec son diocèse, et d’y faire passer des instructions et des écrits relatifs aux circonstances ou se trouvait la religion. Sa réputation de savoir et de piété l’avait suivi en pays étranger ; elle le mit en rapport avec des hommes célèbres, et notamment avec le comte de Stolberg, si connu en Allemagne par ses ouvrages et par l’éclat de sa conversion. (Voy. Stolberg.) Ce seigneur s’était adressé a l’évêque de Boulogne pour qu’il l’éclairât sur quelques dogmes et pratiques de la religion catholique. Une correspondance s’établit entre eux, et le prélat satisfit à toutes les objections du comte, qui abandonna l’église luthérienne en 1800, et se fit catholique, ainsi que presque toute sa famille. Ce fut Asseline qui rédigea l’Instruction sur les atteintes portées à la religion, qui est datée du 15 août 1798, et signée de quarante-huit évêques. Lors du concordat de 1801, il eut beaucoup d’influence sur la détermination des évêques français retirés dans le pays de Munster ou dans les environs. Ces prélats y firent, tous de concert, des réponses dilatoires au bref du 15 août 1801. Asseline est auteur de la lettre du 20 mars 1802, des Réclamations canoniques du 4 avril 1803, signées de trente-huit