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Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 31.djvu/412

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du comte de Ludo. Le colonel d’ornano, doué d’un extérieur avantageux et d’une imagination active, était fait pour les succès qui tiennent à l’intrigue : l’époque était favorable au développement des dispositions dé ce genre ; combien pourtant n’y avait-il pas à risquer dans l’entreprise de diriger un prince remuant, mais qui ne pouvait obéir longtemps aux impressions qu’il avait reçues, et qui les oubliait ou s’y dérobait par une faiblesse qu’il ne pouvait vaincre. D’Ornano, avec une sévérité habilement tempérée, prit un ascendant rapide sur l’esprit de son élève, et il s’en promit un résultat brillant pour lui-même, en suggérant à Gaston le désir d’être admis au conseil du roi. Le prince avait à peine seize ans, et il insista pour obtenir cette haute anticipation aux affaires, d’autant plus qu’on fui représentait que sa demande acquérait un nouveau poids par la considération de la stérilité de la reine. Le marquis de la Viéville, qui dirigeait alors Louis XIII, n’eut pas de peine à desservir d’ornano et à le faire enfermer à la Bastille, puis transférer au château de Caen. Mais bientôt la Viéville lui-même, par une vicissitude de cour, perdit sa liberté : le duc d’origans réclama son gouverneur avec une chaleur qui ne fut pas infructueuse. Il le nomma premier gentilhomme de sa chambre, et surintendant général de sa maison : la reconnaissance enhardit d’Ornano ; le prince demanda pour son fidèle conseiller le brevet de maréchal de France, et d’Oruano le reçut le 7 avril 1626. Ces honneurs couvraient les préparatifs de sa perte. Richelieu, qui n’avait pu le gagner, lui imputa la résistance de Gaston au mariage que lui proposait la cour. Il accuse encore d’Ornano d’avoir déterminé le frère du roi à contracter avec une princesse étrangère une union qui le rendrait indépendant.

Le 4 mai, Louis XIII donna l’ordre d’arrêter une seconde fois le nouveau maréchal, qui se trouvait impliqué dans la conspiration de Chalais (voy. Talleyrand). De Fontainebleau on le conduisit au château de Vincennes, où il mourut le 2 septembre 1626. On eut de graves soupçons qu’il avait été empoisonné. Le duc d’Orléans ne parut point affecté de cette mort : il avait fait ses preuves d’indifférence en abandonnant Chalais au ressentiment de ses ennemis. Le maréchal d’Ornano, qu’Arnauld d’Andilly a loué dans ses Mémoires, n’eut point de postérité. Ses restes furent rendus à son épouse, qui lui fit ériger un magnifique tombeau sans l’église d’Aubenas. On peut consulter, outre les Mémoires du temps, la Vie du maréchal d’Ornano, par Carrant, secrétaire des commandements de Gaston, imprimée d’après les manuscrits de la Bibliothèque de St-Germain des Prés, dans le Conservateur, août et septembre 1760. C’est une apologie ; mais elle est écrite avec beaucoup de simplicité et de bonne foi. Quoique Alfonse d’Ornano eût laissé trois autres fils, attachés sous différents titres au service de Gaston, sa famille s’éteignit en France en 1674. Une autre branche s’est continuée en Corse. On retrouve un Luc d’Ornano parmi les chefs de cette île qui combattirent les derniers pour l’aventurier Théodore (voy. Nsunor), et un général d’ornano qui a porté les armes avec distinction au servce de la France, dans les guerres d’Espagne et de Russie. (Voy. l’article suivant)

F-t.

ORNANO (Luc), général des insurgés corses en 1731, né à Santa-Maria, arrondissement d’Ajaccio, descendait d’une branche de l’illustre famille des précédents. Quoique Luc Ornano concourût après 1729 avec les autres chefs de l’insurrection corse à soustraire sa patrie au joug des Génois, son caractère inconstant et son ambition l’égarèrent au point de le faire remarquer d’abord au nombre des partisans les plus exaltés du roi Théodore (Voy. Neuhof), qui le créa marquis et commandant général des provinces méridionales de son royaume. Les mêmes causes le poussèrent à accepter des Génois le titre et les honoraires de colonel d’infanterie. Mais ce dernier engagement, qui au surplus n’était qu’un leurre offert pour le détacher de la cause de sa patrie, n’eut jamais assez de pouvoir pour décider Luc Ornano à prendre les armes contre ses concitoyens. Au contraire, lorsqu’il eut acquis plus tard la preuve certaine de la duplicité et de la perfidie des ennemis, il se jeta de nouveau dans les rangs des défenseurs de la nationalité corse, qu’il soutint, quoique bien faiblement, jusqu’en 1751, époque à laquelle il rentra pour toujours

dans la vie privée.

G—ry.


ORNEVAL (d’), né à Paris à la fin du 17e siècle, fut un auteur dramatique ingénieux et très-fécond ; mais il n’a travaillé que pour les théâtres de la foire. Sa première pièce, intitulée Arlequin gentilhomme ma gré lui, en trois actes, n’a point été imprimée. Le manuscrit, que possédait Pont de Vesle, passa plus tard dans la bibliothèque de M. de Soleinne. Le nombre des pièces composées par d’Orneval seul est très-petit ; mais il en a donné beaucoup en société avec Lesage, Fuselier, Lafont, Piron, Autreau. La liste que Desboulmiers en offre, p. 432 du tome second de son Histoire du théâtre de l’Opéra-Comique, s’élève au delà de soixante. On peut aussi consulter les Mémoires pour servir à l’histoire des spectacles de la foire (par les frères Parfaict), t. 2, p. 300. 302 et 319. D’orneval a été, avec Lesage, l’éditeur du Théâtre de la foire, 1721-1737, 9 vol. in-12 (voy. Lesage et Carolet). Les dernières pièces de d’Orneval sont de 1732. Cependant il n’est mort qu’en 1766, et si obscur, que l’almanach des spectacles de Paris, pour l’année 1767, le met encore au nombre des auteurs vivants. D’orneval est mort pauvre, et cela n’est pas étonnant. Dans sa jeunesse il était auteur, et dans sa vieillesse il s’occupa de la

pierre philosophale.

A. B-t.