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Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 6.djvu/327

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rapprendre a l’école ce qu’on savait depuis 2 000 ans. On les laissa dire. Les leçons des deux professeurs, simples et claires, à la portée de ceux qui les écoutaient, multiplièrent de très-bons élèves ; et ceux-ci, répandus dans les boulangeries de tous les quartiers, eurent bientôt amélioré la fabrication du pain ; les hôpitaux et les prisons ne tarifèrent pas à s’en apercevoir. La création des comices agricoles appartient aux Anglais ; Cadet de Vaux, en les leur empruntant, les organisa d’une manière plus conforme à nos mœurs, et prépara le bien que ces réunions ont opéré. L’Œnologie de Chaptal, quoiqu’elle laisse peu à désirer, était pourtant ignorée des propriétaires de vignobles, c’est-à-dire des hommes les plus intéressés a la connaître. Le résumé qu’en a fait Cadet de Vaux comprend, dans une feuille ou deux, tout ce qu’il leur importe de savoir, et peut tort aisément être entendu des vignerons les moins intelligents. Les bouillons extraits de la substance des os étaient une découverte et sont un bienfait. À Paris, l’auteur en fut remercié par des chansons, et chez l’étranger, par des félicitations et des hommages sérieux et mérites. En 1791 et 1792, il préside l’assemblée de son département, et les moins sages louèrent sa sagesse. Libre de cette honorable fonction et retiré dans son petit domaine de Franconville, il y donna suite a des observations sur les arbres à fruits. Là, s’étant aperçu que des rameaux probablement détachés de l’espalier, et pendants le long de la tige, étaient plus chargés de fruits que les branches restées dans la position horizontale, il crut on avoir trouvé la raison, et publia, comme un fait positif, ce qui avait besoin d’être confirmé par des expériences précises et répétées. Cette méthode, offerte sous le nom d’Arcure, fut essayée dans plusieurs jardins, même à Vitry ; mais les effets ne répondirent point a ses promesses. Toutes les classes de citoyens ont occupé le zèle de Cadet de Vau : t. Il a pu se tromper, mais de bonne foi, en cherchant le bien, ou le mieux qui n’est pas toujours l’ennemi du bien. Sa probité, sa délicatesse étaient à toute épreuve ; il serait aisé d’en citer plusieurs traits ; celui-ci suffira : Cadet fut chargé de prononcer sur des tabacs suspects. Au premier coup d’œil, il les jugea gâtés. Une compagnie, dont cette déclaration allait blesser les intérêts, lui proposa 100 000 fr., et, pour toute réponse, il fit jeter les tabacs à la mer. L’argent est la dernière pensée des hommes qui se dévouent au bien public. Ceux-la ne sollicitent ni pensions ni places. Ils ne demandent rien, et le gouvernement les prend au mot. Après cinquante ans de travaux sans interruption, Parmentier possédait 2 000 fr. de rente. Cadet de Vaux, plus qu’octogénaire, en possédait encore moins. Il allait manquer du nécessaire, quand son fils, manufacturier à Nogent-les-Vierges, l’enleva de Paris, à force d’instances, et le recueillit dans sa maison. C’est là que ce bon fils, qui prit un tendre soin de la vieillesse de son père, l’a perdu le 29 juin 1828. Tous les écrits de Cadet de Vaux n’ayant pas été rassemblés, nous indiquerons les plus connus : 1° les Instituts de chimie de Spielman, traduits du latin, 1770, 2 vol. 2° Observations sur les fosses d’aisance, 1778. 3° Avis sur les blés germés, 1782, 4° Avis sur les moyens de diminuer l’insalubrité des habitations après les inondations, 1785, 5° Mémoire sur les bois de Corse, avec des observations générales sur la coupe des arbres, 1792. 6° Instruction sur l’art de faire les vins, 1800. 7° Recueil de rapports et d’expériences sur les soupes économiques et les fourneaux à la Rumford, 1801. 8° Mémoire sur la peinture au lait, 1801. 9° Moyens de prévenir et de détruire le méphitisme des murs, 1801. 10° Mémoire sur la gélatine des os et son application à l’économie alimentaire, 1805. 11° De la Taupe, de ses mœurs et des moyens de la détruire, 1805. 12° Traité du blanchissage domestique à la vapeur, 1805. 15° Sur le Café, 1807. 14° Essai sur la culture de la vigne, sans le secours de l’échalas, 1807, 15° De la Restauration et du Gouvernement des arbres à fruits, 1807. 16° Mémoire sur la matière sucrée de la gomme, 1808. 17° Traité de la culture du tabac, 1 10. 18° Le Ménage, ou l’Emploi de fruits dans l’économie domestique, 1810. 19° Moyen de prévenir les disettes, 1812. 20° Des Bases alimentaires et de la pomme de terre, 1815, etc. 21° L’Art de l’œnologie réduit à la simplicité de la nature, par la science et l’expérience, suivi d“observations critiques sur l’appareil Gervais, Paris, 1825, in-12, avec un post-scriptum publié dans la même année. Cadet de Vaux était un des principaux collaborateurs de la Bibliothèque des propriétaires ruraux, et du Cours complet d’agriculture pratique, 6 vol. in-8°. M. Deyeux fils a fait de lui un très-bon éloge.

D-És.

CADET DE GASSICOURT (Charles-Louis), fils unique de Louis-Claude (voy. ci-dessus), naquit à Paris, le 25 janvier 1769. Son père, qui l’aimait avec tendresse, lui disait souvent : « Je serais bien fâché, mon ami, que tu fusses assez riche pour te croire dispensé de travailler. Si je te regardais comme un sot, je thésauriserais pour toi ; mais je t’estime assez pour penser que tu aimes mieux que je te laisse des amis que des rentes. » Ces amis étaient d’Alembert, Buffon, Francklin, Bailly, Condorcet, Lalande. Cadet de Gassicourt les voyait souvent chez son père, et son goût se trouva plus naturellement dirigé vers la philosophie et les lettres que vers les travaux du laboratoire. Il appartenait à une famille célèbre dans les sciences et dans les arts. Sa mère descendait, par les femmes, de Vallet, médecin de Louis XIV. Cadet de Gassicourt fit de bonnes études au collège de Navarre et au collège Mazarin. L’abbé Charbonnet, ancien recteur, racontait que le grand prix du discours français eut été décerné au jeune élève, si sa composition n’avait été empreinte de cet esprit philosophique qu’il avait puisé dans la société des amis de son père, et dont on craignait l’envahissement dans l’instruction publique. Il n’avait pas encore quinze ans lorsqu’il envoya un mémoire sur l’histoire naturelle à Buffon, qui s’étonna en le lisant. À vingt ans il était marié. Il avait embrassé la carrière du barreau, et tut reçu avocat en 1787. Il plaida quelques causes avec esprit, avec suc-