Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 2.djvu/223

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

qu’il lui soit permis de porter des armes ; c’est une de ces contradictions comme on en voit tant chez les Turcs et dont le gouvernement ne s’occupe guère. Il ne se passe pas de jour que je ne traverse le bazar des cuivres, où se fabriquent les plateaux et ustensiles de cuisine, et qui fait plus de bruit à lui tout seul que la capitale et ses faubourgs. Il m’arrive aussi quelquefois de passer dans la rue où se trouvent les manufactures de pipes. Toutes les industries de l’Orient semblent appelées à la confection d’un chibouk ; toutes les régions de l’empire apportent leur tribut ; Alep donne ses tiges de jasmin ou de cerisier, l’Asie mineure fournit une argile rouge ou noire que la Hongrie achève de préparer, la Perse envoie ses pierreries, son ivoire ou ses perles, et la mer elle-même paye son tribut, en livrant son ambre gris ou jaune. Que de bras sont employés pour, fabriquer, la noix, le tuyau et l’embouchure de la pipe ! Que de soins, que de mouvemens, que d’opérations pour perfectionner ce meuble favori des Turcs ! et quand la pipe est achevée, il faut encore que Laodicée et Thessalonique envoient ces feuilles brunes dont la fumée enivre les Osmanlis. Si une ordonnance impériale venait à proscrire aujourd’hui l’usage du tabac à fumer, comme cela est arrivé quelquefois, je suis persuadé que cent mille familles mourraient de misère et de faim dans la capitale et dans les provinces.

Je voudrais vous donner une physionomie géné-